Zones humides : «un changement de culture pour les élus»
La prise en compte des zones humides dans les projets de développement économique est une chance pour la LPO et Ciel Sud Haute-Marne qui réagissent à notre reportage du 17 février. Elles constatent que les élus vont devoir s’adapter.
Forcément, du côté des associations de défense de la nature, on ne voit pas les choses de la même manière. Ce qui est pris comme une contrainte nouvelle dans le développement économique d’un territoire par les uns est une chance de préserver la biodiversité pour les autres. La LPO (Ligue de protection des oiseaux) et Ciel Sud Haute-Marne ont souhaité réagir suite à notre reportage du 17 février consacré aux contraintes nouvelles pour la protection des zones humides.
En effet, le PETR du Pays de Langres et le Grand Langres ont découvert, à leur dépens, cette nouvelle réglementation appartenant à la loi sur l’Eau pour la protection des zones humides. La zone du Breuil à Montigny-le-Roi a été entièrement abandonnée quant à celle de Langres-Nord, à Rolampont, cinq hectares ont été sanctuarisés car répertoriés en zone humide. Pour mémoire, la zone d’activité de Rolampont a été labellisée zone de référence éclatée 2002 par la région Champagne-Ardenne.
Mais à cette époque, les préoccupations environnementales n’étaient pas une priorité. Depuis la situation a évolué notamment avec la loi sur l’Eau. Mais pas seulement. «Depuis près de deux ans, la France est face à une situation météorologique préoccupante en raison d’un déficit de pluie particulièrement important. Plus de 70 communes du Grand Est ont connu des approvisionnements en eau. Quelle que soit la situation des prochaines semaines, l’hiver 2023 figurera parmi les dix hivers les moins arrosés depuis 1959», écrivent les deux associations.
L’intérêt de ces “éponges” n’est plus à démontrer. «La loi s’est plutôt adaptée. Il y a eu tellement de destructions de zone humide. Le législateur a dit : Il faut préserver ce qui reste car leur rôle est important et notamment pour préserver la ressource en eau», commente Etienne Clément, responsable de la LPO en Haute-Marne qui précise que «la France a vu disparaître 50 % de la surface de ses zones humides entre 1960 et 1990, l’urbanisation étant en effet l’une des causes majeures de ces disparitions.»
Les zones humides de plus en plus protégées
Refroidi par l’arrêt des travaux immédiats par arrêté préfectoral pour la zone du Breuil, le Grand Langres a commandé une étude sur la zone de Langres-Nord dont les résultats ont confirmé la présence de zones humides. Cinq hectares ont donc été sanctuarisés. Mais le Grand Langres devra “compenser” les aménagements à venir. Cela signifie créer des aménagements naturels pour compenser les surfaces humides qui seront urbanisées. Ce sont généralement des opérations très complexes. Mais ce qui est certain, c’est que «la loi va se durcir», avertit Etienne Clément.
Et cela passer par exemple par la démarche ZAN, zéro artificialisation nette. Celle-ci va demander aux collectivités de réduire de 50 % le rythme de l’urbanisation des sols d’ici 2030, et d’arriver à 0 % en 2050. «Il y aura des choix à faire pour concilier développement économique et réduire la consommation foncière», avance Etienne Clément. Il faudra certainement aussi se pencher sur une nouvelle destination des friches commerciales ou industrielles.
«Les élus vont y être confrontés. Il vaut mieux qu’ils soient pro-acteurs qu’ils ne subissent ce qui leur est imposé», estime Etienne Clément. Ce dernier a bien conscience qu’il y a un virage bien plus aigu à prendre. «C’est un vrai changement de culture pour les élus. On avait les élus bâtisseurs, aujourd’hui il faut préserver les zones agricoles, les zones humides, les zones classées pour la biodiversité», énumère Etienne Clément. Et il ne faut pas parler de contraintes supplémentaires mais plutôt de prise en considération. Ce qui n’est pas la même démarche…
Ph. L.