Yannick et Florian Michel, profession de voies
DANS LA VOITURE DE… Mardi 8 août, jhm quotidien a embarqué dans le camion de Yannick et Florian Michel, père et fils, dépanneurs automobiles de leur état, au Val d’Ornel. Si la période est calme, les ficelles du métier sont bien trop méconnues pour ne pas s’y pencher le temps d’une matinée.
Les deux hommes font la paire. Yannick, 58 ans, le père, jamais le dernier pour une boutade, avec sa moustache peignée, et Florian, 33 ans, le fils, une tête de plus que son daron et qui ne se défait jamais d’un large sourire communicatif. Les Michel, leur patronyme, sont dépanneurs automobiles au Val d’Ornel. Ils nous ont reçu dans leurs locaux, mardi 8 août, peu après 8 h.
Métier évolutif
« C’est une période très calme », prévient tout de suite Yannick Michel. Pas sûr donc, de partir en intervention. Qu’à cela ne tienne, c’est une autre phrase du paternel qui retient notre attention : « En général, nous n’avons à faire à un dépanneur qu’une fois dans notre vie. » Force est de le constater, leur numéro figure rarement parmi les favoris sur nos téléphones. Et pourtant, le métier regorge de spécificités bien souvent obscures pour les non-initiés.
« Le rôle premier du dépanneur, c’est de permettre aux automobilistes de reprendre leur route, pas d’embarquer le véhicule », explique Yannick Michel. En y réfléchissant, ça tombe sous le sens, même si les images de voitures chargées dans des camions de dépanneurs en bord de route – celles que nous voyons le plus souvent – laissent à penser le contraire. Et les chiffres disent aussi l’inverse. Seuls « 35 % des dépannages se font sur place », estime le dépanneur.
Pourtant, les deux hommes constatent une recrudescence des appels pour des “petites pannes” (crevaison, batterie déchargée…). « La voiture a beaucoup évolué, et les gens n’ont pas toujours été informés des évolutions, ils sont vite perdus », constate Florian Michel. D’où la nécessité pour les dépanneurs de se mettre constamment à jour, pour intervenir dans les meilleurs délais en choisissant le véhicule de dépannage adéquat parmi la flotte de six camions qu’ils possèdent. « Une petite Renault Zoé électrique fait le poids d’un 4×4 à moteur thermique, à cause des batteries », précise par exemple Yannick Michel.
Un robot dépanneur ?
Aucun appel n’aura retenti dans la matinée. Père et fils nous font quand même embarquer dans un camion, monstre mécanique qui nécessite un peu d’escalade pour atteindre la cabine. La main sûre, Yannick démarre l’engin, et réalise quelques manœuvres. Peu après, Florian nous montre les capacités d’un robot « capable de prendre en charge les voitures dans les conditions les plus hostiles, en sous-sol ou empêtrées dans les bois ». Et si le robot tombe en panne ? « Il y a un treuil, donc on s’auto-dépanne », sourit le fiston.
Si le milieu de l’été est plutôt synonyme de quiétude, les périodes de pluie ou les variations saisonnières (le fameux « chaud-froid ») sont bien plus denses. « Comme les week-ends rallongés, à l’occasion des jours fériés », ajoute Yannick Michel. Avec en moyenne 1 400 interventions dans l’année – soit près de quatre par jour – les dépanneurs sont mobilisables « 24 heures sur 24 », dans un rayon d’une cinquantaine de kilomètres autour de Saint-Dizier.
« C’est un peu un sacrifice de vie », reconnaît le père. « Il y a toute une charge émotionnelle à gérer, mais on se blinde », poursuit le fils, lorsque nous évoquons la vue potentielle de cadavres lors d’accidents graves. Du positif, quand même ? « Être toujours dehors, sur la route, échanger avec des gens qu’on ne reverra jamais dans notre vie. On a un peu un rôle de psy », énumèrent les deux hommes. « Vous savez, on rentre dans le dépannage comme on rentre dans les ordres. C’est la même dévotion », conclut Yannick Michel. Parole d’évangile.
Dorian Lacour