Vox Dei – L’édito de Patrice Chabanet
Porter le fer dans la plaie, c’est à l’évidence la ligne de conduite adoptée par le pape François. Son déplacement à Marseille le confirme une nouvelle fois. La deuxième ville de France cristallise tous les enjeux du pourtour méditerranéen, la crise migratoire en particulier. Le chef de l’Eglise catholique se veut le défenseur des migrants – lui-même étant un fils d’immigrant italien. Il puise dans la doctrine chrétienne la justification de ses prises de position : « aime ton prochain comme toi-même ». Cela lui vaut une belle volée de bois vert administrée par l’extrême droite qui lui reproche pêle-mêle sa méconnaissance du sujet et son intrusion dans le débat politique. Objectivement (comme d’habitude…), une partie de l’extrême gauche joue la même partition.
A dire vrai, la mission de François n’est pas seulement de transmettre la voix de Dieu, mais de prendre part, et parfois partie, aux affaires de ce monde. Son illustre prédécesseur, Jean-Paul II, s’y était adonné avec passion et ténacité. Il ne s’est pas contenté de déplorer la dictature du communisme en Europe de l’Est. Il a participé à sa destruction.
Le pape François a bien perçu que l’avenir de l’Europe se jouait dans la Méditerranée. Rejeter à la mer les candidats à une nouvelle vie reviendrait à remplir un « cimetière », pour reprendre ses termes. La Première ministre italienne d’extrême droite, Georgia Meloni, l’a bien compris. Elle a mis de l’eau dans son chianti.
Cela dit, toute injonction papale empreinte d’humanité ne suffira pas à régler un problème là où les politiques se cassent les dents, prisonniers de leurs calculs électoraux ou géostratégiques. Laissons quand même à François le courage de pousser sa pierre comme Sisyphe. Chaque centimètre gagné est une victoire sur l’indifférence.