Vétérinaire de campagne : Chalindrey espère…

Société. Le manque de vétérinaires en France est criant depuis 20 ans, en particulier en milieu rural. Chalindrey n’a plus de praticien de ce type depuis la fin des années 80. Des Sorciers appellent de leurs vœux un “véto” sur la cité. Les animaux de compagnie y sont nombreux…

Après les déserts médicaux, la ruralité est confrontée aux déserts vétérinaires. Sur les 18 500 vétérinaires que compte la France, seuls 4 000 exercent encore en zone rurale. Pourtant, c’est à la campagne que se trouve la majorité des animaux.

Les vétérinaires sont en effet essentiels non seulement pour prendre soin de la santé et du bien-être des millions d’animaux d’élevage, mais aussi pour assurer la veille sanitaire en lien avec les pouvoirs publics et surveiller par exemple l’apparition de maladies contagieuses comme la grippe aviaire, la brucellose ou la tuberculose…

Les animaux des fermes (ovins, bovins, équidés…) pour lesquels les déplacements sont obligatoires font partie du quotidien et également les animaux domestiques traditionnels (chats et chiens), de basse-cour et les nouveaux animaux de compagnie (NAC) avec les rongeurs, les oiseaux, les carnivores, les serpents…

« Nous sommes sollicités depuis de longues années pour un cabinet de vétérinaire à Chalindrey qui simplifierait les choses et les déplacements d’autant plus que lorsque des urgences se manifestent, il est difficile d’avoir des rendez-vous rapidement », expliquent le maire Jean-Pierre Garnier et l’une de ses adjointes, Emilie Foussadier. Elle est elle-même propriétaire de cinq chats stérilisés, identifiés provenant de l’association Les Vagabonds du 52, association dans laquelle elle est bénévole, mais aussi d’un lapin, deux gerbilles et bientôt deux rats.

Les élus n’occultent pas aussi les départs prochains de plusieurs médecins qui pourraient prendre leur retraite en fin d’année 2024 et qu’il sera aussi peu aisé à remplacer. « En plus de rechercher des médecins, on recherche des vétérinaires », résument les deux élus.

C’est en 1989 que le cabinet de Jean Doquet, venu s’installer à Chalindrey en 1947, a fermé ses portes sans successeur.

« Un service de proximité en plus »

Les habitants du secteur de Chalindrey se déplacent soit à Fayl-Billot ou à Saints-Geosmes voire pour d’autres à Champlitte.

Chantal Mougin, de la rue Victor-Hugo, possède six chats identifiés et pucés. « J’ai toujours eu des chats comme ma mère d’ailleurs », assure cette propriétaire d’une minette de 20 ans, qui n’a pas de véhicule et qui utilise les services Linggo de transports à la demande pour amener ses chats chez le vétérinaire à Langres pour les vaccinations et les soins habituels. « Un vétérinaire sur place à Chalindrey, ce serait l’idéal et bien pratique », complète Chantal Mougin.

Une vision identique est partagée par Babeth Belin de l’impasse Général-de-Gaulle qui bichonne sa « gentille chienne Rubis de 3 ans jamais malade mais qui demande à être vaccinée ». Là encore, pas de permis et de voiture pour se déplacer et Linggo prend le relais pour transporter yorkshire et maîtresse… « Un véto à Chalindrey, ce serait drôlement bien et un service de proximité en plus » résume Babeth Belin.

De notre correspondante Sylvie Baudot

Des initiatives pour attirer les vétérinaires en zone rurale

Ce que les jeunes diplômés mettent en cause, c’est le manque d’attractivité du territoire. Les zones rurales ont de moins en moins de services : manque de médecins, peu d’écoles, services administratifs aux horaires d’ouverture incompatibles avec les leurs, loisirs éloignés de leurs lieux de vie… Un problème de fond qui pèse dans la balance lorsqu’un choix entre la ville et la campagne s’impose.

Pour pallier ces déserts vétérinaires, le conseil national de l’Ordre des vétérinaires met en œuvre de nouvelles mesures. Parmi elles, l’instauration d’un stage dans une structure rurale en cinquième année d’école pour que les étudiants se familiarisent avec le territoire rural et soient en contact avec des éleveurs. L’Ordre des vétérinaires veut aussi repenser le système de recrutement, en permettant à des profils différents d’intégrer les écoles – la grande majorité des nouveaux entrants actuels étant issus de milieux urbains.

Ces mesures viennent s’ajouter à la loi DDADUE (diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture) de novembre 2020, qui permet aux collectivités territoriales d’attribuer des aides aux vétérinaires décidant de soigner des animaux d’élevage, dans des  déserts vétérinaires.

A Chalindrey, les plus vieilles familles se souviennent de leur vétérinaire, Jean Doquet, le dernier à avoir exercé sur Chalindrey et les fermes environnantes. Fils d’une famille de vignerons à Vertus (Marne), il n’a pas pris la suite du domaine de son père, Roger.

Après avoir débuté comme remplaçant en Normandie en 1946, Jean Doquet est venu à Chalindrey l’année suivante et s’y est fixé en épousant Andrée Deniset, la fille de Marius Deniset, meunier-boulanger à Chalindrey. « Mon père était surtout un vétérinaire rural qui allait dans les fermes. Il portait toujours des bottes le Chameau et une blouse grise », se remémore son fils Jean-Claude,  qui est aujourd’hui sur Vertus au domaine viticole et dont le fils Alexandre a repris le flambeau.

« Mon père travaillait beaucoup. Tour à tour, avec mes deux sœurs et mon frère, chacun d’entre nous l’a accompagné dans ses visites et a pu se rendre compte de la dureté des conditions d’exercice de son métier, notamment l’hiver, lorsqu’il lui fallait intervenir en pleine nuit pour un vêlage ».