Valentine, agricultrice à Paris

Valentine Huguenot est agricultrice installée avec son père depuis quatre ans à la ferme l’Arc-en-Ciel à Jussey. Ils produisent du lait pour l’IGP Gruyère de France et depuis deux ans font de la vente directe en yaourt et fromages.

Valentine Huguenot est au moins la quatrième génération d’éleveurs de la famille. Elle aime le métier. « Ce que j’aime dans mon métier c’est qu’on est polyvalent, on fait naître un veau et on l’élève toute sa vie pour ensuite pouvoir transformer son lait en produit que l’on commercialise à la fin. Nous sommes éleveurs, producteurs de lait, producteurs de produits laitiers, vendeur, livreur, on gère les papiers », confie-t-elle. De par leur production de lait pour l’IGP Gruyère de France, ils ont un cahier des charges strict à respecter pour pouvoir rester dans l’IGP : alimentation des vaches, gestion des veaux.

« Nous avons beaucoup de contraintes environnementales surtout, la gestion des effluents d’élevages, des haies dans nos terrains, des cours d’eau, des cultures et des prairies », poursuit Valentine Huguenot. Avec trois copines agricultrices, elles n’ont pas pu partir avec les collègues dans le convoi de tracteurs parti le 30 janvier à 2 h du matin, à cause de leurs impératifs professionnels. Mais elles se sont organisées pour partir en minibus les rejoindre le mercredi et en ont profité pour apporter un peu de ravitaillement alimentaire. Valentine Huguenot a offert aux agriculteurs déjà sur place depuis deux jours, 50 yaourts à boire fait à la ferme et 6 kg de gruyère. « Ça me tenait à cœur de participer à ma manière. » Les entreprises du coin ont joué aussi le jeu et ont fait partir gratuitement leurs chauffeurs et leurs camions remorques pour redescendre de Paris les agriculteurs de Haute-Saône avec les tracteurs sur les camions pour ceux qui ne pouvaient pas rester sur le point de blocage. Valentine Huguenot avec le minibus a descendu les collègues.

« Nous sommes tous solidaires évidemment dans le métier on est tous au même niveau en France. Et nous avons été agréablement surprises par le nombre de personnes qui nous soutenaient aussi. Les chauffeurs routiers nous klaxonnaient et faisaient des pouces par la fenêtre. (…). On a beaucoup de soutien autour de nous surtout dans le monde rural où nous vivons. On souhaite pouvoir vivre correctement de notre métier sans crouler sous les charges qui ne cessent d’augmenter, et les contraintes qu’on nous infligent alors qu’on importe des produits d’ailleurs qui ne respectent pas les normes de France. Que le lait et la viande soient payés à sa juste valeur et que les grandes surfaces arrêtent de profiter de nous. Le métier d’agriculteur est le seul métier où c’est l’acheteur qui fixe le prix au vendeur (sauf en vente directe évidemment) », indique l’agricultrice.

Valentine Huguenot reste optimiste : « On est jeune, on reprend la suite de nos parents, grands-parents, et le prix du lait et de la viande est quasiment le même qu’à leur époque. Mais tout le reste à côté a augmenté. C’est là le problème. Nous on veut juste vivre de notre métier correctement ».

La jeune femme l’avoue : « Elle ne sait pas si la manifestation fera bouger les choses mais au moins les agriculteurs se feront entendre de manière assez symbolique et forte. On espère de tout cœur que cela fera de l’effet sur le gouvernement. En tout cas, nous avons un métier prenant donc nous ne pouvons pas rester des jours et des jours sur les points de blocages ». Espérons que des suites favorables leur seront données.