Urgence(s) – L’édito de Christophe Bonnefoy
Les psychiatres sont-ils fous ? Question caricaturale, bien sûr ! Et raccourci facile qui ne plaira pas forcément aux intéressés, tant il est le fruit d’une idée tellement reçue qu’elle vient coller à ces professionnels l’étiquette de spécialistes aussi torturés que leurs patients.
Alors nuançons : les psychiatres… ont-ils de quoi être perturbés ? Là, ça se discute et il n’y a rien de scandaleux à poser cette éventualité sur la table. Principalement lorsqu’ils sont issus du milieu hospitalier. Ce mardi, ils étaient ainsi mobilisés contre le « délabrement » du secteur. De l’autre côté de la barrière, du côté des malades, d’aucuns pourraient penser qu’après tout, ce n’est pas bien grave. Que l’urgence est aux soins médicaux, du simple bobo aux cas les plus lourds. Et que la tête attendra.
Sauf que la psychiatrie ne traite pas uniquement – encore une idée reçue – les maux de malades mentaux. Elle a, de plus en plus, sans doute, à croiser le chemin de milliers, voire de millions de personnes déstabilisées par une société anxiogène. Par des mois de pandémie qui ont rebattu les cartes en terme de santé. Physique, comme psychologique. Combien de dépressions supplémentaires, par exemple, depuis l’arrivée du Covid ? Et la dégradation de la situation économique ? Comme tout le secteur hospitalier – et plus largement celui de la santé -, celui de la psychiatrie tire la sonnette d’alarme.
Là aussi, il y a urgence. Là également, la santé de l’hôpital impacte directement sur celle des patients. Et là encore, le personnel tient bon… jusqu’au jour où la corde aura été si éprouvée qu’elle finira par rompre.