Une semaine, un livre
Deux romans parus dans la collection de poche des éditions Payot-Rivage.
Sœurs de sable, de Stéphane Heaume
Une barque glisse silencieusement sur des eaux noires. Deux passagers essaient le plus discrètement possible de se débarrasser d’un cadavre. Qui est-il ? Qui a commis le crime ? Pourquoi ?
Deux jeunes femmes, à 60 ans d’intervalle, vont apporter des réponses. Rose d’abord, en 1958, une écrivaine américaine qui vient de s’installer à Porfou, dans une station balnéaire méditerranéenne, avec l’ambition de rénover un ancien hôtel de luxe aujourd’hui déserté et dont elle vient d’hériter. Elle se sent vite écrasée par ce projet démesuré dont elle n’a pas les moyens financiers et souffre de sa solitude, d’autant plus que sa sœur Elisabeth, dont elle est voisine, se montre particulièrement détestable. Jusqu’à ce qu’elle croise un jeune homme aux yeux verts qui va être le catalyseur d’un drame sous-jacent… Amélia, 60 ans plus tard, est une jeune chroniqueuse, elle vient de divorcer et cherche un sujet qui puisse passionner ses lecteurs. Justement, son voisin, un nonagénaire élégant, distingué et très discret, l’intrigue. Elle enquête et découvre que c’est un musicien célèbre, qu’il se cache sous un nom d’emprunt… et qu’il a séjourné à Porfou. Elle gagne son amitié et le persuade de s’y rendre quelques jours avec elle.
Tous les protagonistes sont en place et les histoires de Rose et d’Amélia se déroulent en chapitres alternés jusqu’à la résolution finale. Un roman au charme suranné et à la douce fantaisie qui évoque un peu les univers d’Agatha Christie.
Héritage, de Miguel Bonnefoy
Héritage, une saga franco-chilienne passionnante nourrie par l’histoire de la famille paternelle de l’auteur, Miguel Bonnefoy sur un siècle, à partir de 1870.
Tout est parti du phylloxera qui a ruiné un vigneron jurassien et l’a contraint à l’exil. Un pied de vigne rescapé dans ses bagages, il s’embarque pour un voyage vers la Californie mais s’installe au Chili où il fonde la famille des Lansonier (de Lons-le-Saunier) et fait prendre racine à son cep de vigne. Dans cette fresque s’inscrivent les figures originales de cette famille d’aventuriers. La casa Francesa de la rue Estada, à Santiago du Chili, a abrité des êtres au caractère bien trempé et aux destins peu ordinaires. « Un petit cocon français », dit l’auteur en parlant de la maison familiale, « une petite France à l’étranger ». Héritage de notre langue « qui palpite encore beaucoup en dehors de l’Hexagone ».
Une fiction imprégnée aussi de la culture littéraire latino-américaine, mêlant réalisme cru et imaginaire débridé, dans un style qui se fait alors ample, luxuriant et poétique.
De notre correspondante Françoise Ramillon