Une prise de choix – L’édito de Patrice Chabanet
Il aura fallu pratiquement trois mois à l’armée russe, prétendument la deuxième du monde, pour prendre le contrôle total de Marioupol dans le Sud de l’Ukraine. Les derniers défenseurs de l’aciérie d’Azovstal ont rendu les armes. Première victoire de la Russie, premier revers, attendu, de l’armée ukrainienne. A y regarder de plus près, le succès des Russes doit être relativisé. Ils ont repris la main sur une ville qu’ils ont totalement dévastée. Une méthode longuement éprouvée au fil des conflits, avec une philosophie de la guerre bien spécifique : les bombardements n’ont pas qu’une finalité militaire, ils sont – aussi – punitifs.
Et demain ? Personne ne peut dire si le Kremlin, fort de sa victoire à Marioupol, va s’en contenter et jouer la carte diplomatique pour consolider ce gain territorial. Autre hypothèse : une relance générale des combats dans le Sud de l’Ukraine, ne serait-ce que pour prendre pied à Odessa, ville stratégique.
Pour les pays voisins de l’Ukraine et leurs alliés occidentaux la vigilance s’impose. Poutine a une vision très nationaliste de ses relations internationales. Il considère tout ce qui entoure la Russie comme une chasse gardée. Version russe de l’espace vital des nazis. Entre dictatures, on se comprend. Les Etats baltes, la Moldavie et la Pologne savent déjà à quoi s’en tenir, non pas maintenant, mais dans cinq ans ou dix ans. Le seul frein aux visées expansionnistes russes demeure le nerf de la guerre, l’argent. C’est d’ailleurs la carte que jouent les Etats-Unis : épuiser l’économie russe sous le poids des dépenses militaires. Logique sur le papier, mais à hauts risques dans les enchaînements souvent erratiques d’une guerre.