Une polémique de plus – L’édito de Patrice Chabanet
La guerre menée contre le coronavirus a des effets collatéraux qui polluent la compréhension de la pandémie. Les polémiques qui s’éloignent souvent de la réalité médicale font partie de ce brouillage d’images. Dernier exemple en date : le projet de loi portant création d’un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires. A priori pas de quoi fouetter un chat et une réponse à tous ceux qui accusent le gouvernement de ne jamais anticiper. Mais c’est bien connu, le diable se niche dans les détails. En l’occurrence le texte établit une séparation entre les personnes qui se font tester ou, bientôt, vacciner, et les autres. Pour ces derniers, le Premier ministre s’autorise à limiter leur accès aux moyens de transports ou à certains lieux, et l’exercice de certaines activités.
Inutile de dire que les oppositions ont sauté sur l’occasion pour dénoncer des dispositions « liberticides ». Après le fameux article 24 de la loi sur la sécurité, trop c’est trop. C’est surtout un gros loupé – un de plus – de communication. Y avait-il urgence à brandir ce projet de loi au moment où toutes les énergies doivent se mobiliser autour d’une campagne de vaccination ? Ce n’est sûrement pas le meilleur moyen de vaincre les réticences de la population. Sur le fond, la vérité ne sortira pas de la confrontation des points de vue politiques. Sachant que la liberté de ne pas se faire vacciner, rappelée par le chef de l’Etat, ne devrait pas pénaliser ceux qui ont fait ce choix. En cela le projet de loi marque une contradiction certaine.
C’est le réalisme qui s’imposera, qu’on le veuille ou non. Ce pragmatisme ne sera pas made in France. Il sera tributaire de ce que feront les autres pays – et que font déjà certains – à savoir prouver par un document, un passeport sanitaire, que l’on a été vacciné avant de pouvoir entrer. En attendant, les débats parlementaires vont osciller entre les certitudes des uns et les envolées lyriques des autres. Ainsi va la démocratie française.