Un pêcheur de l’Amance dit voir… un crocodile, l’OFB continue de vérifier
Jean-Paul en a encore les sangs tout retournés. Alors qu’il pêchait dans l’Amance, il a soudain vu… un crocodile, confie-t-il. Sur le coup, il a déguerpi. Puis prévenu le président de l’AAPMA, qui a fait un signalement auprès de l’office français de la biodiversité. Qui cherche des preuves de la présence d’un éventuel saurien.
« Ça m’est arrivé un jeudi, il y a au moins un mois maintenant ». Jean-Paul revient péniblement sur ce souvenir qui lui glace les sangs. D’autant qu’il redoute maintenant qu’on ne le croie pas, qu’on le moque. À la mi-juillet, cet habitant de l’Amance s’offre une partie de pêche, son épouse l’accompagne, positionnée à distance. « La pêche, j’y allais tous les soirs ». Jean-Paul a découvert ses plaisirs assez récemment, et il avait acheté d’un coup une carte pour son épouse, ses quatre petits-enfants, et lui. Ce fameux jeudi de juillet, le voilà donc à pêcher dans l’Amance, sur la commune de Bize, entre le Moulin de la Mothe et la ferme Bandelier. « J’étais un peu caché par un arbre ». Quand il voit… un crocodile « qui se laisse couler » dans la rivière, « moitié hors de l’eau ». Jean-Paul insiste : l’animal « flotte ». Sa « carcasse » est faite d’ « écailles comme celles d’une tortue », sa tête ressemble à « un bec » dont il évalue la longueur à « au moins 25 centimètres » ; en tout, l’animal mesure « entre 1,30 et 1,50 mètre ».
Grosse « pétoche »
« Soudain, il m’a vu : il a été surpris. Du coup, il s’est retourné ». Sidéré, Jean-Paul est frappé par le « ventre jaune » que la bête découvre dans sa volte-face pour « plonger aussi sec, à pic, à la manière d’un rat musqué ». Sa « carcasse était grise ». Le pêcheur convient facilement qu’il a alors « la pétoche ». La partie de pêche s’arrête aussitôt. Il hèle son épouse. Si, postée très en aval, elle n’a rien vu, « elle a entendu » le fort claquement de l’eau – du plongeon. Jean-Paul prévient aussitôt le vice-président de l’association agréée pour la pêche et la protection du milieu aquatique de l’Amance (AAPMA) Jacky Poinsot, qui répercute lui-même son récit à son président Florian Poinsel, qui « a fait le nécessaire ». C’est-à-dire alerter l’office français de la biodiversité (OFB). La panique qui étreignait Jean-Paul relatant son histoire avait saisi Jacky Poinsot. Aujourd’hui, Jean-Paul peste. « L’OFB a réagi une semaine après ». En clair, « trop tard » à ses yeux. L’OFB confirme la pose de pièges photographiques. Sauf que Jean-Paul se dit que « quand ces bestiaux sont dérangés, ils changent le territoire. En un mois, celui-là aura fait du chemin ». Si, à chaque signalement de la présence d’un animal hors du commun, l’institution reste prudente, elle donne toutefois le sentiment d’être attentive au témoignage de Jean-Paul. En tout cas, « jamais on ne (lui) avait signalé un crocodile en Haute-Marne ».
Encore saisi de frayeur, Jean-Paul avait filé… naviguer sur Internet pour tenter d’identifier la bête qu’il avait vue. Elle lui paraissait ressembler à « un petit alligator ». Il s’est alors aperçu que l’image de son souvenir correspondait à celle d’un caïman. Le week-end des 20 et 21 août, l’OFB a relevé ses pièges photo. Pas de crocodile sur les images. Mais l’institution a laissé son dispositif de surveillance en place, et continue ces premiers jours de septembre, ses « vérifications ». Mais « il fait sec », empêchant de toute manière à repérer des empreintes. « Et puis l’Amance court sur une centaine de kilomètres… ».
Fabienne Ausserre
f.ausserre@jhm.fr
Baptême du feu
« Un incendie avec du fuel, plus de 300 kg de poissons morts… et le fameux caïman… ». Pour ses huit premiers mois de présidence de l’association agréée pour la pêche et la protection du milieu aquatique de l’Amance (AAPMA), Florian Poinsel vit un véritable baptême du feu. Salle des fêtes de Bize, mardi 30 août, le président a organisé une réunion. Si le caïman n’est pas son objet principal, il est inévitablement à l’ordre du jour. « Pour l’instant, une seule personne a vu le caïman ». Reste que « l’OFB est passé deux jours après » et que Florian Poinsel a appris « dans le journal » que l’institution avait posé des caméras. « Je ne sais même pas où elles sont ». S’il souligne qu’un seul témoignage fait peu, reste que non seulement il n’a aucun motif à douter d’une personne qu’il connaît, mais il sait que l’Amance comporte « des trous profonds de plus d’1,50m », et c’est le cas sur le lieu où le pêcheur a vu l’animal. Autrement dit, il a de quoi vivre et bien caché dans ce cours d’eau. « Ce qui me fait flipper, c’est la question de la responsabilité ». Et de rappeler qu’ « une semaine après le signalement, une manifestation avec des chiens avait lieu ». Pas bien prudent pour ceux-ci, à son avis. Maintenant, Florian Poinsel garde la tête froide. « J’ai reçu un message disant que le crocodile avait attaqué quelqu’un à Laferté-sur-Amance… ». En clair, il trie les alertes. « Moi, je n’ai aucune preuve de l’existence de ce caïman ». Dans l’assistance, on pointe que si caïman il y a, l’hiver lui sera fatal. « Au moins la preuve qu’il existe serait faite… », lâche, dépité, Florian Poinsel. Parce que parmi les messages dont on le bombarde, il en est un plus troublant : « dans le secteur, il y a eu une vache dont les mamelles ont été mangées. Elle en est morte ». C’est en apprenant qu’un crocodile avait été vu que son propriétaire lui a signalé cette affaire. Qui date toutefois de mi-avril. Sauf que tout récemment, on lui a confié avoir vu « un énorme remous », exactement où Jean-Paul soutient avoir vu l’animal. Au moins est-il à coup sûr présent dans toutes les têtes.