Un nouveau tournant – L’édito de Patrice Chabanet

Les manifs contre la réforme des retraites ont perdu leur souffle, mais elles maintiennent un niveau de contestation indéniable. Les défilés d’hier revêtaient un sens plus particulier : ils précédaient d’un jour la conférence de financement. C’est en effet aujourd’hui que se revoient partenaires sociaux et gouvernement. L’idée de ce rendez-vous revient à la CFDT qui fait du financement la pierre angulaire de la réforme. Cela revient à prendre en compte des éléments qui ne sont pas sur la table et qu’il faudra chiffrer: le minimum retraite et la pénibilité. Faute de quoi, Laurent Berger ne cache pas que l’avenir des négociations risque d’être compromis. Or ce sont les syndicats réformistes qui en obtenant le retrait de la notion de « l’âge pivot » ont empêché la réforme de sombrer dans la confusion.

La CGT et FO assisteront à la conférence sur le financement, malgré leur opposition irréductible à l’ensemble de la réforme. Une manière d’être présents dans une arène où ils ne manqueront pas, à la faveur des prises de parole, de rappeler leur position. Quelques jours après les critiques émises au Conseil d’Etat, les deux syndicats se sentent pousser des ailes. Indirectement, elles ont raidi la position de la Cfdt qui ne veut pas passer pour la béquille d’un exécutif en difficulté dans les sondages, plus particulièrement sur le dossier des retraites. Cela promet des discussions animées, sachant que la conférence d’aujourd’hui ouvre un long cycle de négociations dont l’issue est (officiellement) prévue fin avril. En cas d’échec, le gouvernement pourra alors reprendre la main et agir par ordonnances. Jouable sur le plan constitutionnel mais à très hauts risques au niveau social, car le front syndical (réformistes et contestataires) sera reconstitué.