Un Monégasque à la barre
Mardi 7 juin 2011, 11 h 50, Tribunal de grande instance de Chaumont : le juge Thil et ses assesseurs examinent un dossier impliquant un résident de la Principauté de Monaco. Rentier suite au décès de son père, Stephan Brückner a été intercepté sur l’axe autoroutier A 31 en possession de 380 grammes de Skunk, variété de marijuana particulièrement appréciée des fumeurs de cigarettes mal roulées. Les réquisitions du Parquet tombent, le jugement est mis en délibéré. Après une longue audience, magistrats et greffière peuvent s’accorder quelques minutes de pause.
De retour en salle d’audience, un homme s’avance. Un soupçon gagne les esprits : génial guitariste du groupe Led Zeppelin, Jimmy Page serait-il appelé à se présenter à la barre ? Le rêve ne tarde pas à s’éclipser. L’homme aux longs cheveux poivre et sel n’est autre que Stephan Brückner. Présent en matinée, l’homme s’est attardé dans le couloir attenant à la salle d’audience. Au titre de l’article 462 du code de procédure pénale, le juge Thil doit rouvrir les débats.
A la barre, le prévenu faisait enfin état de sa situation. «Je suis plongeur-scaphandrier monsieur le juge, indiquait Stephan Brückner. Certes, je n’exerce plus depuis une bonne dizaine d’années, mais je resterai plongeur-scaphandrier jusqu’à ma mort. J’ai hérité de mon père en 1997 et j’ai arrêté de travailler. Depuis, je voyage, je lis, j’écoute de la musique et je m’occupe de ma famille.»
Interrogé par le juge Thil quant à son rapport aux stupéfiants, Michel Rossi se livrait en toute décontraction. «J’ai consommé de l’héroïne pendant dix ans et j’ai arrêté au décès de mon père, révélait le quadragénaire. En ce qui concerne le cannabis, je fume depuis l’âge de 15 ans. Vous me parlez d’addiction, mais il serait plus juste de parler d’hygiène de vie. Je vais aux Pays-Bas tous les quatre mois parce que l’herbe est d’excellente qualité. A mon âge, je privilégie un impératif de qualité !»
«C’est mon style de vie !»
Condamné par le passé à Monaco et en Belgique pour des faits liés aux stupéfiants, Stephan Brückner défendait clairement ses choix. «Ma consommation touche à ma vie privée, affirmait le prévenu. J’ai acheté de l’herbe dans un pays où la vente est légale et j’ai acheté cette herbe avec de l’argent honnêtement gagné. Le soir, quand je rentre chez moi, je ne bois pas l’apéro, je fume un joint. C’est mon style de vie !»
Conseillant au prévenu de «s’installer aux Pays-Bas afin de pouvoir de griller les neurones en toute liberté», Géraldine Moré requérait dix mois d’emprisonnement assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve avant d’évoquer une éventuelle une interdiction de séjour sur le territoire français.
Après quelques minutes de réflexion le juge Thil rendait sa décision. «Monsieur Rossi, le tribunal vous condamne à 90 jours d’amende à hauteur de 20 euros par jour, soulignait le magistrat. Vous devrez donc régler la somme de 1 800 euros. Dans le cas où vous ne vous acquittiez pas la totalité de cette somme, vous devrez effectuer un jour de prison pour chaque amende manquante. Par ailleurs, compte-tenu de l’enclavement de la principauté de Monaco, vous ne ferez pas l’objet d’une interdiction de territoire.» Indiquant vouloir payer son amende dans les meilleurs délais, Stephan Brückner s’en est allé rejoindre la Principauté idées claires et cheveux au vent.