Un drame national – L’édito de Patrice Chabanet
L’une des vertus de la démocratie est la transparence. En révélant la mort de trois de ses otages tués par ses propres troupes, Israël révèle une nouvelle fois qu’il est une démocratie. La seule au Proche-Orient. En indiquant que les victimes avaient agité le drapeau blanc et avaient imploré les soldats en hébreu, il est allé au bout du chemin de la vérité.
Au-delà de l’émotion suscitée par ce qui est perçu comme un drame national, cet énorme loupé militaire est révélateur. Il témoigne de la fébrilité de Tsahal, l’une des meilleures armées du monde. Affirmer que le commando impliqué avait cru à un piège tendu par le Hamas est accablant. La force des troupes d’élite est d’évaluer la situation en temps réel. A l’évidence l’évaluation a été défaillante. « Les soldats ont agi contrairement au protocole », a réagi l’état-major. Explication un peu courte.
Ce drame ne va pas rassurer une population israélienne de plus en plus tétanisée par le sort de ses otages. On n’est plus en 1967 avec une guerre éclair pliée en six jours, sans prise d’otages. Comme en Ukraine, la guerre s’enlise même si, c’est clair, le Hamas s’est fait sérieusement étriller après son agression criminelle du 7 octobre. Mais qui dit enlisement dit risques accrus de “bavures” ou, tout simplement, de drames humains. Benjamin Netanyahu, déjà aux prises avec la justice de son pays, risque de payer très cher ses fanfaronnades sur une victoire définitive de Tsahal. Quant à l’argument selon lequel on ne fait pas d’omelette sans casser d’œufs, il n’est plus “entendable”, comme on dit aujourd’hui.
p.chabanet@jhm.fr