Un aviateur wasseyen parmi les paras de Diên Biên Phu
A l’occasion du 70e anniversaire de la bataille de Diên Biên Phu, l’historien lorrain Patrick-Charles Renaud réédite, dans une version enrichie, son ouvrage paru en 2003, Aviateurs en Indochine*, qui avait été couronné par le Prix Raymond-Poincaré. Pour jhm quotidien, il évoque le parcours d’un Haut-Marnais, le sergent Michel Muller.
Dès le début du mois de décembre 1953, trois semaines après l’occupation de Diên Biên Phu (jhm quotidien du 11 mars 2024), le groupe de chasse 1/22 Saintonge a détaché quelques avions Bearcat. Outre les pilotes, du personnel au sol (service général) a rejoint le camp retranché : des mécaniciens, des armuriers, fusiliers, etc. Parmi eux, le caporal-chef puis sergent Muller.
Michel Emile Muller est né le 27 avril 1931 à Wassy. Son père, Henri Gabriel Muller, est né à Reims en 1904 et sa mère, Marcelle Bailly, a vu le jour à Louvemont. Au moment de sa naissance, la famille était domiciliée rue Nicolas-Perrin à Wassy. Le père était chauffeur à l’usine à gaz. A noter que son grand-père paternel, Jules Muller, est né en 1878 à Halanzy, en Belgique. Michel Emile Muller s’est marié à Garges-les-Gonesse le 14 octobre 1950 avec Madeleine Laurent.
Lorsqu’il descend du Dakota qui l’amène à Diên Biên Phu au début du mois de décembre 1953, Michel Muller est caporal-chef. Il fait partie du personnel au sol du groupe de chasse 1/22 Saintonge dont les Bearcat assurent l’appui des troupes françaises qui lancent des reconnaissances tout autour du camp retranché.
Citations
Le 13 mars 1954, le Viêt-Minh lance une attaque de grande ampleur. La piste d’aviation étant ciblée, les Bearcat s’envolent définitivement. Puis une grande partie du personnel au sol est évacué in extremis. Sauf le caporal-chef Muller et quelques camarades. Le 17 mars, il est affecté au sein de la 4e compagnie du 1er bataillon étranger de parachutistes (une section « Air », sous les ordres du capitaine Charnod, a été constituée avec le personnel de l’armée de l’air « coincé » à Diên Biên Phu). Dans un premier temps, outre les missions de combat imparties, cette section prenait en charge les évacuations sanitaires, la sécurité – piste et soute à munitions – et la réparation du matériel roulant. Dans son rapport, le capitaine Charnod indique que sa section a participé, sous les ordres des officiers du BEP, aux sorties diurnes et nocturnes (offensives ou défensives). Dans le déroulement chronologique de cette unité, le caporal-chef Muller est cité à plusieurs reprises :
25 mars 1954 : un Dakota du groupe de transport 1/64 Anjou est touché à 13 h 45 par la DCA [défense contre avions] et se crashe vers Huguette 5. Le personnel Air réussit à récupérer l’équipage. Le pilote du Dakota, le capitaine Boeglin, a écrit dans son compte rendu : « L’évacuation terminée, l’équipage et les trois dispatcheurs sont indemnes. Nous sommes accueillis par les jeeps françaises déjà présentes sur place. Quatre aviateurs du camp de Diên Biên Phu ont essayé de débarquer un maximum d’équipements. Trois sont blessés par éclats d’obus alors que l’avion flambe. » Parmi les blessés, figure le caporal-chef Muller.
Mort en captivité
30 mars 1954 : Attaque générale viêt-minh : le capitaine Charnod, commandant le détachement Air, est blessé et ramené par le caporal-chef Muller sous les tirs de barrage. Il écrit dans son compte rendu : « Une mention spéciale est à accorder aux sous-officiers Dirringer-Peyrac et Muller pour leur belle conduite au feu. »
Les aviateurs ont été les témoins des avions touchés et abattus par l’artillerie ennemie. Le 1er avril 1954, le 1er BEP a repoussé les attaques et dégagé Junon avec les aviateurs… Jusqu’à la fin, le point d’appui Junon – proche du PC du colonel de Castries – aura été défendu par le détachement commandé par le capitaine Charnod composé d’aviateurs, de légionnaires légèrement blessés, de quelques tirailleurs marocains, etc. Durant le mois d’avril, deux des camarades du caporal-chef Muller ont été tués lors des combats. Ils ont été inhumés au crépuscule dans le petit cimetière du 1er BEP. A noter que Michel Muller a été promu sergent le 29 avril 1954.
Le sergent Muller a été fait prisonnier le 7 mai 1954, à la chute du camp retranché de Diên Biên Phu. Il est mort en captivité à Phuc Yen le 13 juin 1954. Il aura été de tous les combats durant les 56 jours qu’a duré la bataille.
* 437 pages, éditions Memorabilla, 2024.