Triste héroïne
Les affaires se suivent et se ressemblent dans un département confronté à une hausse de la consommation de drogues dures. Alexis, Quentin, Julien et Robert ont moins de 25 ans. Chacun sera tombé dans une infernale spirale menant à la dépendance.
Dans les romans d’autrefois, l’homme n’embrassait jamais l’héroïne… Les temps ont changé. Jadis réservés à écrivains et musiciens promis à de lumineuses, fécondes et profondes déchéances, les opioïdes sont désormais à la portée de tous. L’héroïne déferle sur le continent européen depuis une dizaine d’années. Caractérisée par l’explosion de la production sur le sol afghan, la hausse de l’offre a généré une chute des cours favorisant une augmentation de la demande. Vendue moins de dix euros le gramme aux Pays-Bas, entre 20 et 40 en France, l’héroïne est accessible à toutes les bourses. Extrêmement addictive, cette drogue est particulièrement prisée des narcotrafiquants, la dépendance des consommateurs assurant la fidélité d’une clientèle de plus en plus jeune. A accessibilité et coût modéré s’ajoute l’évolution du mode de consommation. L’image de la seringue est aujourd’hui révolue : si les toxicomanes en situation d’extrême dépendance ont toujours recours à l’injection, l’héroïne est le plus souvent sniffée. La consommation par voie nasale n’en est pas moins dangereuse.
Vance, Daniel, Jimmy et Benoit en ont fait l’amère expérience. Tous ont moins de 25 ans. Certains porteront longtemps les stigmates d’un véritable naufrage. Amis d’enfance, ces jeunes adultes du bassin nogentais ont sombré au fil des mois. Sans emploi, Benoit Beauvois a découvert le cannabis à l’âge de 16 ans. Quelques mois plus tard, le mineur sniffait son premier trait d’héroïne. «J’ai pris jusqu’à cinq grammes d’héroïne par jour, soulignait le prévenu. Je suis sous Subutex (traitement substitutif à la dépendance aux opiacés, Ndlr) depuis quatre ans, mais je rechute assez souvent. J’ai demandé à être interné, j’ai multiplié les démarches pour suivre une cure, mais il n’y a jamais eu de suite. Pour être aidé, il faut arriver les pieds devant !»
«J’ai replongé»
Soumis à la dépendance, le jeune homme aura effectué 16 voyages aux Pays-Bas. Nancy était également une destination privilégiée. Accusé d’avoir acquis plus de quatre kilos d’héroïne en l’espace de trois ans, Benoit Beauvois en sera venu à fournir une mineure afin de financer sa consommation personnelle.
Jimmy Ferrara a également multiplié les voyages à Maastricht (Pays-Bas). «J’ai commencé à consommer de l’héroïne à l’âge de vingt ans, j’ai suivi un traitement et j’ai replongé. J’ai consommé entre trois et quatre grammes par jour pendant 18 mois», se remémorait le prévenu. Répondant d’usage, de transport, de détention, d’acquisition, de cession et d’importation de stupéfiants, Jimmy Ferrara faisait la fortune de Thomas Sutpen, grossiste de la place chaumontaise récemment interpellé en possession d’un kilo d’héroïne. En l’échange de quelques grammes, Jimmy Ferrara écoulait la marchandise du grossiste auprès de proches.
Une once d’espoir surgissait des propos de Maître Larrière. «Vance Gilliam a signé un CDI au mois de mars et il a commencé à se soigner il y a sept mois, il veut s’en sortir», soulignait l’avocate. Les sanctions tombaient : condamnés à des peines de sursis avec mise à l’épreuve, Jimmy Ferrara, Benoit Beauvois et Vance Gilliam. s’exposeraient à plusieurs mois de détention en cas de non respect de mesures d’obligation de soins. Daniel Boyle – absent à l’audience – a été condamné à six mois de prison ferme.