Tribalisme – L’édito de Patrice Chabanet
Le phénomène de bandes a toujours existé. Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est le niveau de violence et le jeune âge de leurs membres. Deux adolescents, une fille et un garçon, ont perdu la vie dans l’Essonne, à Saint-Chéron et à Boussy-Saint-Antoine. Poignardés à mort tous les deux. On ne peut qu’être révolté par ces jeunes vies fauchées dans cette version revisitée d' »Orange mécanique ». C’est le retour du tribalisme au XXIe siècle. Les spécialistes s’épuisent et nous épuisent à nous donner des clefs d’explication. La drogue ? Le rôle d’amplicateur des réseaux sociaux qui chauffent à blanc les protagonistes ? Les parents qui ne contrôlent plus rien et qui ont démissionné ? Le recul de l’autorité des enseignants dans les quartiers dits difficiles ? La mansuétude de la justice des mineurs ? L’influence du modèle américain ? La vérité se trouve sans doute au milieu de toutes ces raisons.
A force d’expliquer ces dérives mortelles, on finit par les excuser. On ne peut pas d’un côté constater la maturité physique et sexuelle des ados d’aujourd’hui et, de l’autre, justifier leurs délits et leurs crimes par l’inconscience de leur jeune âge. On ne se promène pas impunément avec un couteau dans la poche. On ne lance pas une opération commando, à plusieurs dizaines, dans la ville voisine pour se livrer à des jeux d’enfants.
La solution ? Si elle existait, cela se saurait. Tous les gouvernements se sont cassé les dents dans ce défi qui leur est lancé depuis des décennies. Qu’il faille renforcer la répression face à ces petites frappes, c’est évident. Mais la société, dans son ensemble doit revoir ses fondamentaux. La violence est devenue son carburant dans des affrontements politiques de moins en moins policés. Le cinéma et les séries télévisées se focalisent sur le crime ou la guerre. Certes, la violence n’y est que l’expression d’un jeu d’acteur. Dans les bandes qui se défient, comme hier dans l’Essonne, elle est prise au premier degré. Celui qui tue.