Triangle : des filets pour l’amour des batraciens
Depuis plusieurs jours, les longues bâches vertes tendues au bord de la D 997 près de Bazincourt (dans la Meuse) sont des pièges à batraciens. Ils les empêchent de traverser la route. Ces actions leur seraient fatales en cette période de reproduction. Des jeunes ont découvert le dispositif de protection, jeudi 21 mars au matin.
Chaque année, c’est le même rituel : crapauds, grenouilles et tritons, de la famille des batraciens, traversent les routes à la recherche de mares où ils pourront s’accoupler. Entre Bazincourt-sur-Saulx et Lavincourt, deux communes meusiennes situées à quelques minutes de Saint-Dizier, c’est dans un petit l’étang, le long de la départementale 997, qu’ils ont jeté leur dévolu.
20 minutes pour traverser
« Les mois de mars et avril couvrent la saison des amours de nombreux amphibiens, qui quittent massivement leurs sites d’hivernage pour rejoindre des lieux propices à leur reproduction », explique Gérard Andrès, bénévole depuis plus de treize ans. Mais pour cela, encore faut-il que les amphibiens arrivent jusque-là sains et saufs. Pour rejoindre le point d’eau, la traversée d’une route s’impose. Et le danger est incontournable sur cet axe de forts passages routiers qui mène jusqu’à Bar-le-Duc. « Certains individus peuvent mettre jusqu’à vingt minutes pour traverser une chaussée de 7 m de large », assure Antoine Karp, animateur nature pour l’association Meuse nature environnement (MNE). Les drames de la route n’épargnent pas les batraciens qui finissent écrasés. « Il y a quelques années de cela, la route était recouverte de dépouilles de crapauds communs », se souvient, encore, triste, Gérard Andrès, ancien forestier. Une route bien meurtrière, donc.
Pour sauver la peau de ces petites bêtes, et mettre fin à l’hécatombe, il fallait trouver une solution. Et vite. MNE fait installer des filets pour protéger les animaux. « C’est la 13e année que nous installons des barrières pièges à amphibiens », se félicite Claire Pigelet, animatrice à MNE. La jeune femme poursuit : « Elles permettent de limiter fortement la mortalité des batraciens. »
Ce jeudi matin, peu après 9 h, les bénévoles et les animateurs de MNE ont donné rendez-vous au pied des filets pour expliquer le dispositif de préservation à des jeunes de l’Institut thérapeutique éducatif et pédagogique (Itep) de Montplonne, situé non loin de là. Tous sont arrivés en bottes et avec un enthousiasme communicatif. Et des tas de questions aussi.
Les crapauds comptés un à un
« Tous les 15 m, il y a un seau pour que les crapauds puissent se loger dedans lorsqu’ils sont bloqués par les barrières. Ils ne peuvent pas y sortir », explique Gérard Andrès, qui, avec l’aide de Didier et de Maude, vient ramasser tous les matins les amphibiens pour les lâcher dans l’étang de l’autre côté de la route.
Il est à présent temps de compter les crapauds présents dans les seaux. Mais avant, il faut se mouiller les mains. « Les crapauds ont la peau très fragile au contact des humains et elle se dessèche très vite. Et ce matin, la “pêche” est plutôt bonne. Avec le petit cours de différenciation des sexes, les jeunes savent dorénavant faire le distinguo. C’est au niveau des pattes que cela se joue. Ainsi, en longeant le filet de 240 m de long, ils comptent 78 crapauds mâles et sept crapauds femelles. Ensuite, tout ce petit monde a été posé sur les rives de l’étang.
En longeant l’étendue d’eau, les bénévoles ont aperçu des œufs de crapauds communs. « Les longs fils noirs le long des végétaux, ce sont les œufs qui viennent d’être pondus », montrent Claire et Antoine au petit groupe de jeunes.
Puis, tout le monde s’est rendu en bordure de l’étang pour rechercher les pontes de crapauds, tout en observant les insectes et la faune aquatique.
J. R.
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C’est le nombre précis de crapauds communs que les bénévoles ont sauvé l’année dernière. « C’est bien la preuve que ce dispositif est une vraie réussite », se félicite encore Gérard Andrès, bénévole dévoué au ramassage des batraciens.
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