Dragon boat : toutes dans le même bateau contre le cancer [vidéo]
Chaque dimanche matin, une vingtaine de femmes pagaient à bord d’un dragon boat, sur le lac de la Liez. Toutes combattent ou ont combattu un cancer du sein. Les Roses de la Liez, c’est leur bulle de bien être.
Il flotte comme un air d’été indien sur le lac de la Liez en ce dimanche matin de septembre. Pas un nuage à l’horizon. Il est un peu avant 10 h et le hangar du club d’aviron local s’anime. Les Roses de la Liez sont de sortie, comme chaque dimanche. Et avec elles, leur dragon boat, un bateau à la tête et à la queue de dragon.
Depuis le 8 janvier 2023, c’est le même rituel : ces drôles de dames, gilet de sauvetage sur le dos, se retrouvent pour pagayer sur le lac, pendant près de deux heures. Toutes se battent ou se sont battues contre un cancer du sein. Et cette parenthèse sur les eaux est une bulle de bien être dont elles ne se passeraient pour rien au monde.
Au lendemain de la diffusion du téléfilm « Le souffle du dragon », le 11 octobre 2022, qui raconte justement l’aventure en bateau de femmes atteintes de cancer du sein, Hélène Dehaye Messerli a un déclic. Elle intègrerait bien un équipage de dragon boat, elle aussi. « Je venais de finir ma chimio », se souvient-elle. Renseignements pris, le club le plus proche est à Reims, trop loin. Celui du Der, né un peu plus tard, n’est guère plus accessible.
Un point commun : en traitement ou en rémission d’un cancer du sein
« J’ai fini par me licencier au club d’aviron de Langres, le LACK52, pour me remettre au sport », raconte-t-elle. Quinze jours après sa première séance, elle proposait la création d’un équipage de dragon boat, un projet accueilli à bras ouverts par Gérard Renoux, le président, qui n’était autre que le président, dans le même temps, du Comité départemental olympique et sportif. Et validé – fortement soutenu même – par la Ligue contre le cancer 52, dont Les Roses de la Liez dépendent.
C’est ainsi donc que, le 8 janvier, en plein hiver, quelques femmes se sont retrouvées sur la Liez. Le temps était maussade, le froid glacial. « Un temps horrible. Je me suis dit « elles ne reviendront pas ! ». A la fin de la séance, elles m’ont toutes demandé comment faire pour s’inscrire ». Aujourd’hui, elles sont une vingtaine, de tous les âges, à tous les stades de la maladie, en traitement ou en rémission. Comme Béatrice ou Alexandra, présentes depuis longtemps, mais aussi Lydia, Agnès ou encore Myriam. « Pour rien au monde, on ne manquerait nos séances, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige », confie Alexandra. « C’est notre bulle », résume Agnès, un rang derrière.
En cadence et synchro, les douze femmes qui ont pris place dans le bateau – un DB12 prêté par une entreprise de Lyon -, pagaient avec détermination sur les eaux de la Liez, Langres et ses remparts en toile de fond. Dans le rôle de barreur, ce jour-là, c’est Pierre Juy, l’entraîneur du club d’aviron. Il guide, donne le tempo.
« Un pep’s immense »
A bord, on parle de tout et on rigole, on chambre. On vit. Et bien entendu, on savoure de sentir tout le corps vivre, lui aussi. « On s’évade, ça nous fait du bien », rapporte Lydia. Oui, on parle aussi – un peu – de la maladie. « Parce que c’est notre force de partager notre expérience malheureuse ». « On se soutient, on se donne des astuces », complète Agnès, qui sait bien le mieux être procuré par l’eau froide en période hivernale, « qui éteint le feu des rayons ».
« Ces séances nous donnent un pep’s immense », se réjouit Myriam. « Je ne regrette pas mon choix, même si j’ai mis du temps à franchir le pas ». Trois semaines durant, elle avait gardé dans sa poche, sans pouvoir se décider, le flyer découvert sur le comptoir d’une pharmacie langroise. Aujourd’hui, elle mesure les bienfaits des séances de dragon boat. « Au début, on était des femmes qui pagayaient, aujourd’hui, on est un équipage », résume Hélène Dehaye Messerli, restée sur le ponton ce matin-là en raison d’une opération du tendon d’Achille.
Parce que la « maladie ne choisit pas le moment où elle frappe », la prise de licence – en partie financée par la Ligue contre le cancer – peut se faire n’importe quand dans la saison. « La seule condition, c’est d’être ou d’avoir été atteinte d’un cancer du sein », indique-t-elle. Médicalement, la pratique du dragon boat équivaut à une grosse séance de kiné. « Drainage, musculation, cardio… Le dragon boat peut être considéré comme un soin de support ». D’ici mi-octobre, les Roses de la Liez vont se doter de deux bateaux tout neufs, financés par leurs généreux partenaires et le fonds Leader. Pour accueillir encore plus d’adhérentes.
Delphine Catalifaud