Théâtre : dans un tourbillon de jalousies féminines
« La jalousie des femmes est incommensurable, surtout lorsqu’elles restent entre elles », définit l’écrivaine dijonnaise Camille Laurens, membre du jury du Prix Goncourt.
Le public venu nombreux, en a eu la plus belle illustration vendredi 9 septembre, sur la scène du Casino, avec la très belle interprétation des “Femmes jalouses” signée Carlo Goldini en 1752, restant d’une brûlante actualité. Avec sa vingtaine d’acteurs et de figurants en lice, la troupe de Chalindrey a offert un magnifique spectacle en trois actes dans un décor de Venise de toute beauté et des costumes d’époque étincelant de couleurs chaudes, mettant en scène deux familles de la cité des Doges. Siora Lucrezia, veuve que son mari a laissé sans ressources, est condamnée à vivre d’expédients, transformant sa maison du quartier marchand de la ville en lieu clandestin où les hommes se rendent en cachette pour se refaire. Les ragots vont bon train en s’interrogeant sur ce curieux succès. Les épouses s’interrogent avec les suppositions que l’on devine. Siora serait-elle une mère maquerelle ? Dans ce Ridotto, alors club aristocratique, on jouait au loto derrière les masques de l’anonymat. Les protagonistes sont entraînés dans une spirale de dépendance pathologique au jeu, dans un tourbillon de jalousies délirantes, d’affronts publics, d’équivoques grotesques et une totale dérive morale. Les rapports humains sont misérables, articulés autour de la mesquinerie, de l’hypocrisie et de la bêtise. Toutes ces relations pourries sont conditionnées par des motifs économiques, avec le culte de l’argent et l’angoisse permanente de tomber dans la misère. C’est le seul souci pour ces personnes qui ne travaillent pas ! Au final, tout finit par s’arranger grâce au hasard des jeux, permettant à chacun de se renflouer. Le public a réservé un véritable triomphe au remarquable jeu de ces acteurs d’autant que les dialogues ne riment pas toujours dans la simplicité.