Surprise, surprise – L’édito de Patrice Chabanet
C’est rassurant pour la démocratie : les résultats électoraux ne constituent pas la photocopie des sondages. Les élections européennes viennent de le confirmer. Des surprises, et pas des moindres, ont émaillé le scrutin. On disait les Français peu intéressés par l’enjeu. Or plus d’un sur deux s’est déplacé, soit dix points de plus que prévu. On affirmait que les écologistes ne parviendraient pas à franchir la barre des 10%. Ils ont atteint plus de 13%, ce qui leur assure une solide troisième place. On nous annonçait que François-Xavier Bellamy portait l’étendard de la reconquête chez les Républicains. Certains sondages lui prédisaient 13 ou 14%. Il dépasse péniblement 8%…
A cette aune-là, le résultat des deux principales formations ne fait que confirmer les intentions de vote des dernières semaines. Le Rassemblement national l’emporte d’une courte tête sur LREM. C’est plus la force du symbole que l’importance de l’écart qui est gênante pour Emmanuel Macron. Il avait fait de la défaite du parti de Marine Le Pen sa priorité, et carrément une affaire personnelle. Il a perdu son pari. Cela dit, que son parti soit arrivé premier ou second, le chef de l’Etat a cristallisé le débat politique dans une confrontation exclusive avec la patronne du RN. D’une certaine manière, il prolonge la méthode dégagiste de la présidentielle. La gauche reste en miettes. Le score de Glucksmann n’a rien de flamboyant. La France insoumise a pris l’eau. Quant à la droite, elle espérait remonter la pente. Elle a dégringolé. Laurent Wauquiez risque d’être contesté sur ses choix stratégiques. Ses adversaires internes, cela se sentait hier dans les réactions, en ont gros sur la patate après pareille déroute.
Paysage dévasté à droite et à gauche, Emmanuel Macron est persuadé que le RN reste incapable de briser le plafond de verre dans un second tour d’une présidentielle. Mais on l’a vu hier, la vie politique est faite de surprises. Des leçons devront être tirées de ce scrutin. La poussée des Verts montre en particulier que la carte écologique, comme en Allemagne, devient essentielle.