Sujet sensible – L’édito de Patrice Chabanet

Il aura suffi de quelques mots dans un discours d’une heure
pour qu’Emmanuel Macron déclenche une polémique. L’objet
de la bronca : «Réparer le lien abîmé entre l’Etat et l’Eglise»
Heureusement pour le chef de l’Etat, elle a été amortie par
d’autres sujets d’actualité autrement plus prégnants : l’utilisation
d’armes chimiques en Syrie, la grève à la SNCF et l’évacuation
de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes. Ce qui devient de plus en
plus détestable dans le débat politique national, c’est la violence
des arguments, répétition générale de la violence tout court. La
formule présidentielle peut être contestée ou contre-argumentée.
La démocratie naît de la confrontation des idées. Pas de l’insulte.
Quand Mélenchon compare, dans le texte de son tweet, Macron à
un «sous-curé», il n’y a plus débat, mais une fanfaronnade de plus
dans la bouche de celui qui promet chaque semaine de mettre un
million de manifestants dans la rue.
Emmanuel Macron n’a pas remis en cause la laïcité en tant que
clef de voûte de notre pacte républicain. Le voudrait-il qu’il
s’affaiblirait ipso facto dans le combat qu’il doit mener face aux
intégristes islamistes dont la seule obsession est, précisément, de
remplacer notre laïcité par le primat de la charia. Sans doute, le
mot employé, le «lien» n’était pas le plus heureux. Or, dans cette
matière, les mots contiennent une charge explosive. Le «lien»
établit un rapport organique, ce qui est incompatible avec l’idée
de séparation entre l’Eglise et l’Etat. Le terme «relations» eût
été plus judicieux et moins piégeux, sachant qu’elles existent de
toutes façons entre les deux institutions, ne serait-ce que pour
des questions pratiques.
Comme en politique rien n’est innocent, on peut se demander
aussi si derrière ce qui apparaît pour la gauche comme une
vulgaire provocation ne se niche pas un malin plaisir de mettre
le bazar à droite. La main tendue à la communauté catholique
plaira au courant démocrate-chrétien. A un an des Européennes,
ça ne mange pas de pain.