Sud Haute-Marne : l’intérim en tension
Depuis près de 3 ans, les acteurs économiques tirent la sonnette d’alarme sur le manque de main d’œuvre sur le territoire Sud-haut-marnais… et le secteur du travail en intérim n’échappe pas à la règle. Témoignages d’agences spécialisées dans l’offre et la demande de missions à Langres.
Sup’ Intérim : « Difficile d’approvisionner »
Même constat du côté de Randstad où le responsable de l’agence langroise Guillaume Malczyk, explique qu’il est « difficile d’approvisionner toutes les demandes ». « Nous enregistrons beaucoup de demandes des employeurs, même pour des contrats de type CDD ou CDI. Si nous n’avons pas entré de nouvelles filières, nous avons vu émerger des demandes d’entreprises qui ne faisaient pas appel à nous jusque-là. Mais c’est compliqué de répondre à leurs demandes. Du côté des intérimaires, nous avons eu beaucoup de personnes qui ont quitté la région. Sur ce seul mois de décembre trois personnes ont déménagé : une est partie en Côte-d’Or, une deuxième à Bordeaux et la troisième est désormais en région Auvergne. Les raisons de ces départs sont souvent relatives à l’offre très portée sur le secteur de l’automobile, l’industrie ou le bâtiment », estime Guillaume Malczyk.
Pour le responsable, il est donc plus qu’urgent de trouver une solution pour attirer des gens sur ce territoire qui ne demande qu’à pouvoir se développer.
Manpower : « On retrouve notre niveau d’activité de 2019 »
Chez Manpower, Pénélope Leblond, la responsable de l’agence langroise, est catégorique : nous sommes dans une situation où les missions sont là, mais les intérimaires commencent à manquer.
En effet, si certaines entreprises ont dû, pendant une courte période, limiter les missions intérimaires, cela était uniquement dû au manque de composants. « Il n’y a aucune pénurie de missions, bien au contraire ! Depuis septembre tout est reparti “plein pot” et ce, tous secteurs confondus. En fait, nous sommes même dans une situation où nous sommes plus en recherche d’intérimaires. » Un constat qui est bien évidemment de bon augure pour le territoire, mais qui vient conforter l’analyse faite par les acteurs économiques qui depuis au moins 3 ans tirent la sonnette d’alarme sur l‘absolue nécessité d’attirer de la population. « Beaucoup de missions, actuellement, débouchent sur un CDI. Du côté des employeurs, on est plus attentif au savoir-être qu’aux diplômes. Dès lors que les personnes veulent travailler, ils forment. »
Une situation quasi de plein emploi. « On retrouve notre niveau d’activité de 2019. Le taux de chômage est autour de 5 % et je suis certaine que l’on passera en dessous d’ici peu, d’autant que nous avons noté une recrudescence de missions, notamment dans certaines filières, comme le bâtiment qui revient en force. »
CRIT : « Trouver des candidats reste compliqué »
« Trouver des candidats à des missions d’intérim reste compliqué… comme à des offres d’emploi en CDI au demeurant ». Et, à l’agence CRIT intérim de Langres, on observe de surcroît que « c’est général ». Autrement dit, « il y a très peu de candidats disponibles ». Par conséquent, les offres de missions intérimaires qui n’exigent pas de qualification connaissent le même sort : elles ne trouvent le plus souvent pas preneur. Côté employeurs, la quête tourne à l’impossible, quelle que soit la taille de l’entreprise qu’ils dirigent. « A peu près toutes les entreprises du Sud Haut-Marnais s’en plaignent ». Oui, quelle que soit leur taille, quelle que soit leur secteur d’activité : médical, automobile…
Si jamais au contraire des missions sont pourvues, CRIT intérim constate que c’est leur prolongement qui peut à son tour s’avérer vain pour peu que les intérimaires soient éloignés des alentours de Langres. « Les gens de Chaumont ne restent pas sur le Sud Haut-Marnais ».
En cette fin d’année, l’agence CRIT se retrouve avec un vivier d’ « une vingtaine d’entreprises clientes confrontées à cette pénurie de main d’œuvre intérimaire » sur les périmètres de Langres, Nogent, Bourbonne-les-Bains… Une pénurie qui franchit la frontière haut-marnaise puisqu’elle impacte également Selongey, enclave proche de Côte d’Or qui relève toujours du secteur de l’agence.
Adecco : « Les missions qualifiées sont plus difficiles à pourvoir »
« La plupart des demandes sont pourvues, même si c’est plus compliqué en termes de sourcing, notamment pour les délais ». La responsable des agences Adecco de Langres et de Chaumont Fanny Fresneau motive aussitôt la situation : « Le taux de chômage est très bas, on est quasiment en plein emploi ». Toutefois, la responsable précise qu’ « il reste des postes où une tendance à la pénurie subsiste : ceux qui requièrent des profils qualifiés et/ou expérimentés ». Et de citer les emplois auxquels correspondent ces missions en tension : mécanicien, chauffeur poids-lourd, soudeur, grutier, coffreur, plaquiste. Dans ces cas, il est plus difficile d’ « aller chercher les intérimaires ». Au point qu’à l’agence Adecco, on explique aux employeurs qu’ils doivent « aller vers un CDD ou un CDI » pour que leur offre soit plus attractive. C’est en effet la perspective d’un contrat plus pérenne qui peut faire changer un intérimaire de poste, poursuit Fanny Fresneau. Si l’hôtellerie-restauration est un secteur emblématique en termes de pénurie de main d’œuvre, il reste peu impacté quand il s’agit de missions intérimaires… même s’il arrive que l’agence Adecco encourage aussi ses chefs d’entreprise à proposer des missions durables.
Patricia Charmelot et Fabienne Ausserre
p.charmelot@jhm.fr et f.ausserre@jhm.fr