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Sophie se battra « jusqu’au bout » pour sa mère

Entre le dossier médical de sa mère et les document qu’elle s’est procurés, Sophie Fleutiaux dispose d’éléments concrets.

HÔPITAL. Le 21 juillet 2015, Michèle Elorrioroz y Artazpi est décédée, au centre hospitalier André-Breton de Saint-Dizier. Sa fille Sophie Fleutiaux dénonce des zones d’ombre, documents à l’appui. Soutenu par son frère dans sa démarche, elle veut tout faire pour que l’on rende la dignité 

« Je suis prête à me battre jusqu’au bout pour enfin faire mon deuil. » Sophie Fleutiaux est déterminée. Le 21 juillet 2015, sa mère, Michèle Elorrioroz y Artazpi, est décédée au centre hospitalier André-Breton à Saint-Dizier, où elle a été hospitalisée 41 années (voir ci-dessous).

Dans la foulée, sa fille se procure son dossier médical, qu’elle lira en intégralité (voir notre encadré). Le point de départ de nombreuses interrogations, restées sans réelles réponses.

Des questions sans réponse

La première chose que Sophie ne comprend toujours pas, c’est la mort de sa mère. « Son dossier médical ne mentionne aucun résultat d’expertise après le décès constaté. En plus, l’heure du décès indiquée est 5 h, mais le logiciel utilisé indique que le rapport a été tapé à 2 h 34… » La soignante sait uniquement que sa mère avait un hématome au niveau du cou. A l’époque, en guise de réponse, le directeur l’invitait à se rapprocher du médecin ayant constaté le décès.

Sophie Fleutiaux dénonce également plusieurs soucis de négligences et de maltraitance médicale. « Elle a fait de l’hypertension en février 2005, mais elle n’a pu voir un médecin qu’au mois d’août. » Des contentions abusives à son lit, des refus lorsque Michèle demandait à sortir, la prise de certains médicaments malgré la contre-indication médicale « pour les personnes cardiaques comme elle », des périodes d’isolement trop récurrentes « décidées par sa tutrice et des cadres, alors que seul le psychiatre est en mesure de le faire », l’absence de documents en lien avec l’accident de la route dont sa mère a été victime en 2001… Ce à quoi le directeur lui avait répondu, dans un mail daté du 26 avril 2016, qu’il ne comprenait pas l’absence de réaction de Sophie au moment des faits.

« Lui rendre sa dignité »

Documents à l’appui, elle nous montre avoir écrit à l’ARS, au ministre de la Santé, également au président de la République… « Je n’ai rien contre l’Etat, car je n’oublie pas que j’en suis une Pupille. Je veux juste que l’on rende à ma mère la dignité qu’elle mérite d’avoir. »

Contacté sur le sujet, le service communication du GHT Cœur Grand Est (auquel est rattaché le CHHM) nous a répondu : « La Direction ne peut pas commenter ce dossier du fait du secret professionnel. Elle se tient toutefois à la disposition de Mme Fleutiaux afin de lui apporter l’ensemble des éléments dont elle dispose. »

Louis Vanthournout

l.vanthournout@jhm.fr

Le parcours difficile de Michèle

En 1974, Sophie est âgée d’à peine 4 ans, quand son petit frère vient au monde. C’est à ce moment là que sa mère « commence à perdre les pédales », elle qui a eu « un parcours difficile », peu aidée par son mari, dixit l’aide-soignante. Michèle est alors admise à l’hôpital, elle qui souffre de dépression même si le terme est peu – voire pas du tout utilisé – à l’époque. Sophie est alors placée en foyer, son frère en famille d’accueil.

Ce que Sophie peine à comprendre, c’est que sa mère « était sortante en 1977 et en 1980. Pourquoi ce n’est jamais arrivé ? Une personne bipolaire peut vivre avec un traitement. On nous a privé de notre mère. »

Sur ses quinze dernières années, elle a été placée à 13 reprises en isolement. Jusqu’à ce qu’elle s’éteigne, le 21 juillet 2015.

Des recherches acharnées

Suite à son décès, Sophie parvient à se procurer le dossier médical de sa mère. Dossier riche de centaines de pages, qu’elle décide de lire en intégralité, sans en rater une miette. « Au départ, c’était vraiment une façon pour moi de mieux comprendre le parcours du patient. » Mais dès la première lecture, elle relève quelques éléments troublants. C’est alors qu’elle se remémore certains propos de Michèle, tenus de lors de son hospitalisation : « Je ne travaillais pas dans le même service », explique l’aide-soignante. « Il m’a fallu du temps, le déclic pour réaliser. »

Depuis, Sophie n’a pas hésité à relire les dossiers plusieurs fois, pour exploiter la moindre zone d’ombre grâce à ses contacts et le fruit de ses recherches. De quoi remplir, aujourd’hui, deux gros classeurs dignes des encyclopédies de Diderot et D’Alembert. « Sans ça, jamais je n’en serais arrivée à mener un tel combat aujourd’hui. »

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