Silence complice – L’édito de Christophe Bonnefoy
On imaginait Didier Gailhaguet dans ses petits patins, hier au moment de devoir s’expliquer devant Roxana Maracineanu. En tout cas on pouvait l’espérer. Puisqu’on évoque beaucoup le terme d’humanité en ce moment, on supposait qu’au moins le président de la fédération française de patinage esquisserait un mea culpa face à la ministre des Sports. Il n’a concédé que des « erreurs ». Pas de faute.
Ne nous y trompons évidemment pas. Les actes que l’ancienne championne Sarah Abitbol vient de dénoncer dans un livre concernent avant tout l’entraîneur de l’époque, Gilles Beyer. Des attouchements. Des viols, des mots mêmes de la victime. De l’une des victimes. Si Beyer a reconnu, à demi-mot, des pratiques inappropriées – là aussi, le mot est à la mode lorsqu’on ne veut pas en prononcer un autre, beaucoup plus radical -, il n’est peut-être pas l’unique fruit pourri du système mis au jour ces dernières heures. Il y a en effet ceux qui ont agi, salement. Beyer et peut-être d’autres. Et ceux qui n’ont pas dénoncé, alors qu’a priori ils connaissaient tout d’actes susceptibles de détruire des vies. Car c’est bien de cela qu’il s’agit.
Des silences ? Au nom de quoi ? Pas de la beauté du sport. Mais de ce qu’il (r)apporte. A ceux qui dirigent. Pas aux sportifs.
Visiblement, le pouvoir et le sentiment de toute-puissance autorisent pas mal de choses pas vraiment recommandables. Y compris de lâchement fermer les yeux. Et par la même occasion finissent par jeter l’opprobre sur une discipline entière et tous ceux qui, eux, font leur travail avec passion, sans jamais dévier. C’est malheureusement sans doute vrai, aussi, dans d’autres sports. Ailleurs également, c’est à craindre, on sait, mais personne ne dit rien…