Se sentir concerné – L’édito de Christophe Bonnefoy
L’Etat ne peut pas tout. La formule n’est à la base pas de Jean Castex, mais de Lionel Jospin en 2000. On sait à quel point ce qui est pourtant une vérité a pesé, dans l’anéantissement politique du Premier ministre de Jacques Chirac.
L’Etat ne peut pas tout. Le locataire actuel de Matignon l’exprime un peu différemment aujourd’hui, lorsqu’il évoque la pandémie de Covid-19. En résumé : le gouvernement a fait ce qu’il fallait faire, il convient désormais à chaque Français de se sentir « concerné par la lutte » contre le coronavirus. On serait donc passé en deux décennies de l’Etat-providence à celui qui “éduque” les Français à compter sur eux-mêmes. Et pas seulement sur ceux qu’ils ont élus. En gros, à prendre leur propre destin en main. Ça se tient. Qui plus est, on ne sort jamais si fort d’une crise que quand on a soi-même contribué à la combattre.
Sauf qu’en matière de santé publique, il n’y a guère que les experts autoproclamés – ceux qu’on a beaucoup entendus depuis le mois de mars – à être pétris de certitudes. Les Français sont bien obligés, pour le coup, de s’en remettre aux décisions gouvernementales.
Des décisions, justement, dont ils ne contestent pas la nécessité. Mais dont ils s’exaspèrent qu’elles consistent parfois à dire tout et son contraire à quelques jours ou semaines d’intervalle. Sur le masque par exemple. Inutile en mars, incontournable en août.
Chacun sait que la rentrée de cette année sera… différente. A tout point de vue. Mais ce n’est pas tant ce constat qui inquiète. C’est plutôt cette impression déplaisante d’une navigation – parfois – à vue et d’une application à géométrie très variable des mesures imposées.