Joinville : succès pour les réhabilitations de la ville haute
Les chantiers de réhabilitation concernant les bâtisses de la ville haute, à Joinville, se sont multipliés depuis dix ans. Une volonté de la municipalité pour sauver son patrimoine et attirer de nouveaux habitants. L’initiative plaît et de nouveaux dispositifs vont être déployés.
Au fil des rues, les façades réhabilitées attirent le regard. Vertes à pans de bois, ou recouvertes d’un enduit jaune pâle, voire teintes d’un doux orangé, les devantures de maisons rivalisent de couleurs dans ces ruelles étroites, typiques de l’époque médiévale. La « Petite cité de caractère » n’en manque décidément pas.
Elle et ses magnifiques bâtisses ont pourtant failli sombrer à partir des années 1980. Surnommée « la petite bourgeoise » avant cette époque, « elle perd des habitants et de nombreux logements sont rénovés à bas coût pour du logement social », se souvient le maire Bertrand Ollivier. Face à une absence de mixité sociale et une dégradation des maisons, la municipalité décide de lancer «une politique incitative sur l’habitat ancien. Nous avons préempté des biens, que nous avons rétrocédés à des particuliers qui se sont engagés dans une rénovation qualitative ».
Et pour le coup, cette politique se voit, concrètement, tout au long des rues. « Nous avons été, en quelque sorte, victimes de notre succès. Les biens exceptionnels ont été revendus à des investisseurs sur un délai de deux ans. Le but n’était pas de peser sur les finances publiques », précise le maire. Quant aux petites maisons, « elles se vendent progressivement. Il en reste encore beaucoup (qui n’ont pas été préemptées, ndlr) mais il n’y a plus de péril imminent », se réjouit le maire. Les préemptions n’ont donc plus vocation à être renouvelées mais « on ne les exclut pas non plus ».
Les artisans renouent avec leur savoir-faire
Le profil des propriétaires s’avère diversifié. Il y a des Franciliens au niveau de vie élevé ou des passionnés du patrimoine qui réhabilitent les grosses maisons. Les logements plus petits appartiennent à « des retraités parisiens ou du secteur, des actifs, notamment de la BA 113 ou des couples qui travaillent à Chaumont et à Saint-Dizier ».
Soutenus par diverses aides spécifiques à l’habitat, certains bricolent eux-mêmes les aménagements et la remise en état, d’autres font appel à des artisans. « Cela permet de valoriser tous les métiers d’art. Beaucoup d’entreprises locales ont remis en pratique leur savoir-faire. Désormais, c’est la majorité de leur travail. D’ailleurs, nous les accompagnons pour qu’ils soient labellisés métiers d’art par la Région », précise Noémie Faux, en charge du patrimoine. Les entreprises de maçonnerie, charpente, toiture, taille de pierre, mais aussi les staffeurs-ornemanistes (qui fabriquent des stucks) profitent de ces nouveaux marchés. « On draine ces corps de métier car il y a un marché. Joinville bénéficie d’un patrimoine remarquable qui se prépare pour demain », ajoute le maire.
Projets à long terme
Il reste cependant encore à faire avant que la cité ne retrouve son lustre d’antan, avec plus de commerces et d’habitants. Après « l’appel à manifestation d’intérêt centres-bourgs », un programme national de revitalisation dont Joinville avait bénéficié en 2015, « un nouveau dispositif d’aides va être mis en place », favorisant notamment l’amélioration thermique des logements, assure Bertrand Ollivier.
On ne pourra pas reprocher à l’homme politique d’avoir une vision à long terme. Depuis sa première élection en 2006, cet ancien banquier met en œuvre petit à petit des projets adaptés à sa commune : « Rien n’est encore sûr, mais si on veut faire venir des gens du centre de stockage de Bure, il faut une offre d’habitat de qualité. En plus, le foncier va se raréfier, les gens vont réintégrer les centres anciens. Il faut aussi créer un aménagement global qui s’ouvre aux nouveaux modes de déplacement ». L’avenir s’envisage avec sérénité à Joinville.
Marie-Hélène Degaugue
Sauvegarder l’intérieur des maisons
Depuis 2016, un plan de sauvegarde a été mis en place, qui concerne l’extérieur des bâtisses. La municipalité envisage d’élargir cette protection du patrimoine à l’intéreur des bâtiments, afin de préserver des éléments architecturaux de valeur. Une mesure que n’osent pas toujours prendre les communes en raison de son aspect invasif pour les propriétaires. A Joinville, la mesure semble en bonne voie d’acceptation. « J’ai pu visiter 250 immeubles sur 900. Il y a des joyaux insoupçonnés. Je remercie d’ailleurs les propriétaires d’avoir joué le jeu », confie Noémie Faux.
L’arrêté préfectoral devrait être pris cette année, il restera un règlement à créer. La procédure administrative devrait durer cinq à six ans. Quand elle sera appliquée, les propriétaires seront obligés d’ouvrir leurs portes si la municipalité souhaite vérifier l’état de l’intérieur, et de rénover ou réhabiliter selon des normes spécifiques, chères aux Bâtiments de France.