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tribunal judiciaire de Chaumont : Violences conjugables : le compagnon estime avoir été « critiqué », il s'est « énervé »

Roué de coups et jeté dans une tranchée à Joinville

tribunal judiciaire de Chaumont : Violences conjugables : le compagnon estime avoir été « critiqué », il s'est « énervé »

Le 4 avril 2019, à Joinville, gendarmes et sapeurs-pompiers portaient secours à un homme roué de coups, jeté dans une tranchée, le corps en partie enseveli, inerte, mais en vie. L’auteur désigné de ces violences conteste son implication. Le tribunal a tranché.

Le dossier renvoie à une profonde misère sociale. On ne travaille pas, on tue le temps, entre voisins, on se chamaille, aussi, on sort pour aller au supermarché et puis, on boit, plus que de raison.

Que s’est-il passé, le 4 avril 2019, à Joinville ? Un conflit de voisinage éclate en début d’après-midi. Du tapage diurne, rien de plus. Récemment installé à Joinville, rue Albert-Gigoux, Steve C. se serait posé en médiateur. Au point d’être invité par un de ses voisins « à boire l’apéritif ». Il est 16 h, mais peu importe. L’anisette coule à flots. « Une bouteille d’un litre, à trois. » L’hôte de Steve C. se serait alors montré violent avec sa compagne. « Ils se sont disputés, il lui a mis un coup de tête, je lui ai dit qu’il n’avait pas à se comporter comme ça avec sa femme. » La suite ? « Je suis rentré dans mon appartement, j’ai peut-être bu un verre de rhum, j’ai regardé deux films, vers 20 h, j’ai entendu du bruit dans la rue, je suis sorti et j’ai découvert mon voisin, j’ai essayé de le sortir du trou en le tirant, une voisine est arrivée, je n’avais pas mon portable, elle a appelé les secours. » Aux environs de 21 h 30, gendarmes et sapeurs-pompiers découvraient, dans une tranchée, un corps partiellement enseveli. Le secteur est en chantier. Gravier et gravats recouvrent les jambes de la victime. « Pull et blouson sur le visage », cet homme sera évacué vers le centre hospitalier de Saint-Dizier avant d’être, en raison de son état, transféré vers le centre hospitalier universitaire de Reims. Dans le coma, la victime a été rouée de coups.

Un témoignage déterminant

Les soupçons des enquêteurs viseront rapidement Steve C. Un Bon Samaritain choqué par l’agression de son voisin ? Les enquêteurs remarquent des « projections de sang » sur le visage, les vêtements et les mains du suspect. Autre élément, capital. Les gendarmes ont été alertés le soir des faits par une voisine. « Une voisine vigilante ». Cette femme a aperçu depuis sa fenêtre une « personne de type africain ou antillais », autant dire noire, « mince, de grande taille », soulever la victime par le col à plusieurs reprises avant de lui porter « une dizaine de coups de pied » et de la tirer « sur plusieurs mètres ». Cette femme est formelle. « A 80 %, c’est lui ». Lui ? Steve C. Un temps mis en examen pour le crime de tentative de meurtre avant la correctionnalisation du dossier, le quadragénaire, sans emploi, sensible au mouvement rastafari, par le passé établi en Nouvelle-Calédonie et au Sénégal, « ma passion pour la musique m’a permis de voyager », désormais établi à Rouen, condamné à deux reprises par le passé pour des faits de violence, des condamnations anciennes, décrit comme un « électron libre gouverné par un imaginaire pesant », « impulsif », « immature », mais ne présentant aucune dangerosité psychiatrique, le prévenu a été placé en détention provisoire pendant deux ans. « Animateur dans une association à but culturel », Steve C. crie son innocence depuis son interpellation. Le tribunal n’aura pas été convaincu. Condamné à cinq ans de prison ferme, dont douze mois assortis d’un sursis probatoire comprenant une obligation de soins et visé par un mandat de dépôt différé, le prévenu sera, hors appel de la décision, placé en détention dans les jours à venir.

T. Bo.

Des violences en deux temps ?

La compagne de la victime a été entendue. Les premières violences seraient survenues dans l’après-midi. « Mon compagnon a essayé de me mettre un coup de boule, il (Steve C.) lui a mis quatre ou cinq gifles et il est rentré chez lui. Mon compagnon est parti, il a eu ce qu’il mérite ! » Une version contestée par le prévenu. Autre point mis en lumière par madame le procureur Pelletier. Un litre d’alcool du soleil n’aurait pas suffi. Le dispositif de vidéosurveillance d’une grande surface a capté une image. A sec, partie faire des provisions afin de poursuivre la soirée, la victime est aperçue bouteille à la main, un homme d’une silhouette similaire à celle de Steve C. est à proximité. « J’y étais peut-être, c’est fort possible, mais je ne m’en souviens pas, je me souviens avoir regardé des films. »
Me Lalloz le rappela. « La victime a frôlé la mort, monsieur conteste, mais cette femme, agent de sécurité, sait ce qu’elle a vu depuis sa fenêtre, la scène est gravée dans sa mémoire ! » Ce témoin clé a immédiatement composé le 17 et décrit, en direct, la scène de violence à son interlocuteur. « Monsieur reste dans le déni et le complot, ce témoin clé est les yeux de la justice dans ce dossier », souligna madame le procureur Pelletier avant de dénoncer un véritable « acharnement ». Minée par un taux d’alcoolémie de 2,99 g par litre de sang, la victime n’était pas en mesure de se défendre. Fractures, cinq jours de coma… Les multiples coups essuyés par la victime ont entraîné une Incapacité totale de travail (ITT) de 30 jours. « A mon sens, c’était une tentative de meurtre, monsieur aurait encouru 30 ans de réclusion, monsieur est poursuivi pour des violences, il encourt cinq ans de prison, si on ne requiert pas me maximum de la peine encourue pour ces faits, on ne le requerra jamais ! »

Parole à la défense

Un élément questionne. La voisine arrivée, sur le parking, à hauteur du prévenu et de la victime, a nettoyé le domicile de Steve C. « à l’eau de Javel » avant de dormir chez le suspect, alors placé en garde à vue. « Cette femme, je ne la connaissais pas, je ne comprends pas ! » Un temps mise en examen, cette voisine aura changé de versions à plusieurs reprises avant de mettre en cause le prévenu.
Ce point, parmi d’autres, nourrit le doute de Me Gavignet. L’avocat de la défense aura appelé à la relaxe pure et simple du prévenu, un innocent aux yeux de la défense, un homme placé pendant deux ans en détention provisoire. « Oui, un homme a bien été victime de violences aux environs de 21 h 04, oui, cet homme a reçu des coups, je note que son déficit fonctionnel permanent est limité à 2 %. (…) On parle de cris et de coups portés dans l’après-midi, dans cet immeuble, on entend tout, mais personne n’appelle les gendarmes, il n’y a aucune réaction, ça interroge. (…) Ce témoin clé a vu une personne de “type africain, antillais” est-il indiqué, “antillais”, c’est orienté à mon sens, mais c’est le commentaire d’un avocat orienté, j’en conviens. Ce témoin décrit un homme maigre. On a connu plus malingre ! A un moment, dans ce dossier, on parle de deux hommes partis dans une voiture, mais j’ai compris, cette femme ne pourrait pas se tromper, elle a tout vu, depuis sa fenêtre, à 40 m, à plus de 21 h, le 4 avril 2019, le soleil s’est couché à 20 h 22. (…) Cette femme serait formelle, elle est certaine que c’est lui, à 80 %, mais 80 %, ce n’est pas 100 %, la première vérité, elle est là ! (…) Dans ce dossier, il manque une partie du puzzle. »

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