La “Rolls” du piano français fabriquée à Saint-Dizier
Olivier Colin est le fondateur des pianos Colmann en France. Installé à Saint-Dizier, ce mélomane ne manque pas d’ambitions. Depuis près de 20 ans, son entreprise fabrique de prestigieux pianos qui partent partout dans le monde.
Passée la porte d’entrée, on aperçoit deux gigantesques pianos. L’impression est un peu comme des diamants que l’on ose à peine toucher. Car nul besoin de maîtriser son solfège pour s’émouvoir devant un piano Colmann. Ces bijoux sont, pour la plupart, fabriqués en série limitée. «Ici, ce n’est pas un magasin de pianos, mais un endroit où l’on développe de nouveaux concepts et de nouvelles technologies.» Ce sont les premiers mots d’Olivier Colin lorsqu’il nous accueille dans son entreprise bragarde.
Le chef d’entreprise ne cache pas son attachement au territoire : «J’ai travaillé dans l’armée de l’air pendant 15 ans ici.» Mais sa réelle histoire d’amour est celle qui le lie au piano. Elle dure depuis des décennies. «J’en joue depuis mes quatre ans et un mois.»
Il est aujourd’hui musicien professionnel reconnu dans le milieu. D’ailleurs, Olivier Colin (photo ci-dessus) met toutes ses compétences au service de son entreprise. Il tente de convaincre les potentiels acheteurs, non pas en arguments, mais en notes de musique. «Je joue devant chaque distributeur et acheteur potentiels. Quand je pianote, je suis souriant et dynamique. Les gens aiment ça.»
Aujourd’hui l’entreprise Colmann se porte bien et est réglée comme du papier à musique. Une vraie réussite, quand on sait que l’industrie du piano, en Europe, a subi un réel decrescendo avec la crise «Je produisais peu. Alors je me suis dit, autant faire du très beau», sourit Olivier Colin. Seuls des produits à très forte valeur ajoutée sont fabriqués à Saint-Dizier. C’est alors que l’homme s’est tourné vers le luxe et les automatismes. «Il fallait mettre un coup de jeunes aux pianos, les dépoussiérer. J’y ai également intégré des nouvelles technologies.» Maintenant, Colmann fabrique des pièces sur-mesure qui rendent chaque instrument unique. Ce qui permet au fabricant de séduire des acheteurs internationaux.
Durant sa carrière de pianiste professionnel, Olivier Colin a eu sa petite heure de gloire en Asie. Le pianiste a été à la 5e place du hit-parade durant des années avec une chanson devenue culte. «À l’époque, les gens me demandaient des autographes», se remémore-t-il. Avec cette ancienne notoriété, Olivier Colin souhaite conquérir la Chine. C’est sans conteste l’un des marchés les plus prometteurs pour assurer l’avenir de ses berlines musicales. C’est pour cela que Colmann est déjà implanté là-bas. Fort de ses 150 vols de France en Chine, l’entrepreneur explique pourquoi ce pays asiatique aime la France : «Les Chinois n’attendent qu’une chose : acheter français, car notre pays représente la haute technologie, le luxe, et le savoir-faire.» Chaque semaine, Olivier Colmann fait des tutoriels pour les Chinois.
Il finit ses propos par une mélodie au lyrisme irrésistible dont lui seul connaît l’auteur.
Seul bémol, pour l’entreprise Colmann : le manque de financement. «Depuis le début, les banques ne veulent pas me suivre, donc j’ai plein des projets qui ne peuvent pas se réaliser ici», explique l’entrepreneur qui appelle les mécènes à venir participer à l’aventure : «Je ne ferme la porte à aucun investisseur», sourit l’homme d’affaires.
Malgré cela, la société est prospère. Elle devrait considérablement s’agrandir dans les prochains mois. «Les locaux de notre centre de fabrication auront une superficie supplémentaire de 2 500 m2», garantit Olivier. De même, cette extension aura un impact majeur sur la production. «Nous fabriquerons 1 000 pianos dès la première année. Et près de 15 000 pianos dès la cinquième année dans le pire des cas», projette le pianiste professionnel.
L’entreprise Colmann devrait voir ses effectifs augmenter très prochainement. «Aujourd’hui, j’ai six salariés et une entreprise de sous-traitance. Mais dès la rentrée, je vais embaucher certaines personnes», assure Olivier Colmann qui préfère prendre son temps pour y aller piano.
Jérémy Rattier