Rôles inversés – L’édito de Christophe Bonnefoy
C’est le monde à l’envers. Un monde qui se complaît parfois dans l’ubuesque, jusqu’à obliger celui qui est dans son bon droit à devoir prouver qu’il est honnête. Et assure une sorte d’impunité à ceux qui trichent.
La loi est ainsi faite qu’un propriétaire dont le logement est squatté endosse d’une certaine manière le mauvais rôle. Non qu’il ne puisse prétendre récupérer son bien. Les textes l’y autorisent – et heureusement ! -. En revanche, ils ne lui délivrent bien évidemment pas de passe-droit pour déloger les malotrus manu militari, même si on imagine bien qu’en deux temps, trois mouvements, il pourrait alors, enfin, retrouver la quiétude de son nid douillet.
Le rôle de la Justice est de poser des règles ; pas de tomber dans l’émotion. Histoire de ne pas basculer dans le grand n’importe quoi, avec des citoyens qui définiraient eux-mêmes ce qui est bon et ce qui ne l’est pas et régleraient les problèmes, chacun à leur façon.
Mais en l’occurrence, dans l’affaire de Théoule-sur-Mer, la situation défie la logique. On a, ici, des squatteurs très remontés qui viennent faire appel à un avocat pour réintégrer la maison d’un autre. Et un propriétaire désabusé qui ne sait pas – et ça risque d’être long – quand on lui rendra son bien, acquis il y a 35 ans.
On aurait presque pu sourire d’une mauvaise blague jouée là au pauvre retraité. Mais ce qu’on peut qualifier, au minimum, de désagrément, n’est malheureusement pas un cas isolé. Certains ont en effet bien compris comment s’articule la loi. Quelles en sont les failles. Jusqu’à inverser les rôles et essayer de faire mentir le dicton : “Bien mal acquis ne profite jamais”.