Réunion : des Haut-Marnais dans l’œil du cyclone Belal
Belal, un très violent cyclone s’est abattu dans la nuit de lundi à mardi sur l’île de la Réunion. Le département d’outre-mer a même un temps été placé sous alerte violette, le plus haut niveau existant, empêchant toute sortie même des services de secours. Un certain nombre de Haut-Marnais établis dans l’île étaient dans « l’œil du cyclone ». Leurs témoignages sont parlants.
Carole Boucherie : « J’ai même vu une marmite voler ! »
Carole Boucherie a vécu, enfant, pendant cinq ans à Chaumont – où son père était gendarme – avant de résider aujourd’hui à La Réunion. Elle y a connu un premier cyclone, entre 2005 et 2009. Si, cette fois, il n’y a pas eu de coupures d’eau et d’électricité, la tempête qu’elle a vécue ce lundi l’a impressionnée.
En milieu d’après-midi (il y a trois heures de décalage par rapport à la métropole), La Réunion restait en alerte rouge, après être passée au violet, le niveau maximal. « Ca a commencé à souffler dimanche soir, les vents se sont ensuite bien intensifiés, témoigne la jeune habitante de Saint-Denis. A 6 h, ce matin (lundi), ça soufflait énormément, et c’est à 9 h que nous avons connu la plus grosse rafale ». Depuis, cela s’est calmé. A la différence du cyclone qu’elle a vécu enfant, « il n’y a eu aucune coupure d’eau, aucune coupure d’électricité, mais les vents ont été vraiment hyper forts », commente la jeune femme qui exerce le métier d’assistante dentaire. « Mon store de terrasse a été littéralement arraché par le vent, et j’ai même vu une marmite voler », précise-t-elle. Dans l’est de l’île où vit son père, les dégâts lui ont semblé bien plus importants, avec des arbres couchés, « et de l’eau un peu partout ».
A Saint-Pierre, « réserves en eau et arbres cassés » pour Tom Coulama et Chloé Godard
Volets fermés, réserves en eau au cas où. Comme tous les Réunionnais, Tom Coulama, originaire de Chaumont, et sa compagne Chloé Godard (Lavilleneuve) sont confinés depuis dimanche soir.
Eux qui résident à Ligne Paradis, sur le territoire de la commune de Saint-Pierre (sud de l’île), ne sont pas dans l’oeil du cyclone. Installés à la Réunion depuis trois mois, l’un comme kiné, l’autre comme psychologue, ils avouent avoir été « impressionnés », « mais pas effrayés ». « On a reçu des SMS, comme des alarmes, sur nos téléphones, pour nous dire de nous confiner. C’était comme une grosse sirène. Cela surprend un peu. »
Dehors, c’était l’été. 30°C, un temps magnifique depuis deux semaines. Et soudain, le ciel s’est chargé. « C’était un peu magique, mais tellement bizarre aussi. On s’est un peu demandé ce qui allait nous tomber dessus », raconte Tom Coulama. Prévenus depuis plusieurs jours comme toute la population, Tom et sa compagne ont pu s’organiser, « rentrer tout le mobilier extérieur ».
« Nous ne sommes pas dans une zone à risques car nous n’habitons ni en bord de mer, ni près d’une rivière. Mais il est vrai que nous avons dehors beaucoup d’arbres cassés, et ceux qui restent sont tous coiffés dans le même sens », indique-t-il.
Si ce lundi en fin d’après-midi, c’était l’accalmie, Tom et Chloé restaient prudents, à la maison. « On nous annonce que la tempête peut reprendre d’un coup, avec des vents dans l’autre sens. On va rester barricadés ».
L’inquiétude puis l’attente pour Audric Devaux
Confiné chez lui avec « ses proches et des amis » à Saint-Pierre, le Haut-Marnais Audric Devaux, adepte de trail, attend comme tous les autres Réunionnais la fin de l’alerte lié au cyclone qui touche actuellement l’île de l’océan Indien. Installé depuis 2021 à la Réunion, le jeune homme originaire de Corgirnon explique « avoir eu une grosse inquiétude dimanche au plus fort de la tempête ».
« Dans une telle situation, nous sommes confinés à l’intérieur des maisons, dans le meilleur des cas volets fermés mais pour ce qui nous concerne la maison n’a pas de volets », confie Audric Devaux. Il reconnaît néanmoins que son logement n’a pas été victime de coupures d’électricité ce qui a rendu le temps de confinement moins désagréable. Joint en milieu d’après-midi ce lundi 15 janvier, le Haut-Marnais explique « que depuis quelques instants le temps s’est calmé, il n’y a pas de pluie. Cela fait une drôle d’impression car le ciel est tout jaune comme avant un orage ».
Confronté dimanche à l’alerte violette, le plus haut niveau de vigilance, Audric Devaux souligne que l’intensité du phénomène météorologique « a surpris bon nombre de personnes qui vivent à la Réunion depuis longtemps ». Si la tempête a été violente, le jeune homme souligne que sa maison « n’a pas subi de dégâts car elle est relativement à l’abri puisqu’en centre ville ». Pour autant, il souligne que le passage du cyclone a toutefois fortement impacté les arbres autour de son domicile.
Passé de l’alerte violette à l’alerte rouge depuis la mi-journée ce lundi 15 janvier, le niveau de vigilance sur l’ensemble de l’île de la Réunion permet comme l’explique Audric Devaux « aux services de secours de pouvoir à nouveau effectuer des interventions. J’ai des amis qui sont dans le domaine médical qui étaient bloqués depuis dimanche et de fait ne pouvaient pas s’occuper des patients qui pouvaient avoir besoin de médicaments car ils ne pouvaient pas sortir ».
Karen Brun en direct d’Antenne Réunion
Aujourd’hui rédactrice en chef de la chaine de télévision Antenne Réunion, notre ancienne collègue du JHM, Karen Brun, confinée dans son bureau à Saint-Denis, nous raconte les heures les plus périlleuses du passage du cyclone tropical Belal. Dans ses équipes sur le pont, personne n’a été blessé.
« L’alerte rouge est maintenue mais j’espère que nous allons pouvoir rentrer dormir chez nous ce soir ! » Il est un peu plus de 16 heures à Saint-Denis, capitale de la Réunion ce lundi 15 janvier. Karen Brun est confinée dans les bureaux d’Antenne Réunion depuis plus de 24 heures. Elle a déplié un lit picot dans son bureau mais n’a pas eu l’opportunité de s’assoupir quelques heures. Karen Brun est une ancienne collègue du JHM. Elle est aujourd’hui rédactrice en chef de la chaine de télévision Antenne Réunion et habite sur cette île de l’océan indien depuis cinq ans et demi. Son mari et ses enfants sont restés bien à l’abri dans leur maison, « nous déplorons à la maison un dégât des eaux » mais, dans sa famille, personne n’a été blessé. Dans ses équipes de journalistes non plus même s’ils ont été sur le terrain toute la soirée et toute la nuit. Le passage du cyclone tropical Belal ayant été bien anticipé, « j’ai pu déployer les équipes sur le terrain en amont de l’alerte rouge puis violette. L’objectif était de pouvoir faire notre métier mais toujours rester en sécurité. Les journalistes sont allés se positionner dans les centres d’hébergement, dans des hôtels pour recueillir des témoignages d’habitants ou de touristes confinés », raconte Karen Brun expliquant que les programmes de sa chaine ont été totalement remaniés eu égard aux événements. Sans compter qu’en métropole des chaines comme TF1, LCI ou encore BFM ont fait appel à Karen et à sa chaine pour avoir des informations en direct.
« Nous avons pris l’antenne à 5 h ce matin »
Des pluies diluviennes se sont abattues sur l’île et singulièrement sur la côte nord de la Réunion. Karen évoque ces vents d’une violence rare qui ont balayé Saint-Denis soufflant « jusqu’à 200-220 km/h. »
« Nous avons pris l’antenne à 5 h ce matin », raconte notre ancienne collègue extrêmement sollicitée ces dernières heures en rappelant que tous les déplacements ont été interdits dès le début de l’alerte rouge sur toute l’île. « Une dame a accouché seule à Saint-Paul », raconte Karen car, lors de l’alerte violette, même les secours avaient interdiction de se déplacer.
Impossible sur place de mesurer dès aujourd’hui les dégâts, « nous allons découvrir l’ampleur des dégâts dans les jours qui viennent et toutes les conséquences notamment agricoles à plus moyen terme », explique Karen Brun.
Le cyclone tropical, qui devait toucher de plein fouet toute l’île, a quelque peu dévié sa trajectoire pour davantage longer les côtes. « Nous avons eu un côté de la muraille de vents et un bout de l’oeil du cyclone », détaille la journaliste. « Les prévisions ont été plus alarmistes que la réalité et c’est tant mieux », souffle-t-elle. Elle estime que les autorités « ont bien géré la situation. »
Dans l’œil du cyclone, le temps est comme suspendu
Le fils et les petits-enfants de Catherine Boussard, figure du pays chaumontais, vivent à Saint-Leu, dans le sud-ouest de l’île de la Réunion. Installée depuis quelques mois, la famille n’était guère préparée.
« Je ne sais pas ce qui les a sidérés le plus, la force du phénomène ou la résistance des bâtiments ». Catherine Boussard l’admet, elle a eu peur, mais les témoignages qu’elle a reçus, en images ou de vive voix, l’ont rassurée. « Chez mes enfants, dans le sud-ouest, ce n’était pas le pire. Des vents à 170 km/h maximum. L’Ile est bien préparée, les infrastructures, solides. C’est à peine si les enfants ont vu deux tôles voler ».
Un air d’apocalypse
et les oiseaux chantent
Au milieu du désordre, du ballet acrobatique des arbres et de la cacophonie du vent, les petits-enfants de Catherine Boussard racontent : « Une fois dans l’oeil du cyclone, plus de vent, plus de pluie. Le temps s’arrête, les oiseaux se remettent même à chanter ». Détails tus par qui ne l’a pas vécu. Une amie de la famille, gendarme non loin de Saint-Leu, à Saint-Gilles, relate quant à elle les efforts des forces de l’ordre pour sécuriser au maximum les personnes vulnérables avant la prévisible alerte violette qui confine jusqu’aux forces de secours. Un seul mort à déplorer : un SDF, qui, malgré les efforts des gendarmes, n’a pas voulu se mettre à l’abri. Et un enfant, né à huit mois, que sa maman aura mis au monde, seule, recluse dans son appartement, soutenue au téléphone par un médecin. Les deux se portent bien. Comme on le sait, parfois, du chaos, surgit le miracle.