Retour dans l’horreur – L’édito de Christophe Bonnefoy
Si loin, si proche. Une année de pure horreur. Et un mois de janvier surréaliste. Terrible.
En cette année 2020 où presque tout semble hors de l’entendement, le souvenir des attentats de janvier 2015, puis de novembre, vient rappeler avec quelle violence nous avons pu basculer, un matin, dans le monde d’après. Le fameux monde d’après. Pas celui qui succèdera à la disparition d’un virus, mais un autre, né il y a cinq ans de l’inhumanité de quelques-uns. Pas de l’ensauvagement. Mais de la sauvagerie.
Le procès des attaques de Charlie Hebdo, de Montrouge et de l’Hyper Cacher doit se tenir à partir de demain, jusqu’au 10 novembre. Sans ceux qui ont fait couler le sang. Ils ont été rayés physiquement de la carte de l’humanité. Mais avec d’autres, sombres acteurs indirects d’actes barbares. Nul doute qu’il y aura, pendant un peu plus de deux mois, des silences. Ceux d’accusés qu’on a bien du mal à qualifier de présumés innocents, même si le droit l’impose. Désolé. Des mensonges aussi. Il est pour les terroristes beaucoup plus glorieux de s’attaquer à des innocents que de faire un mea culpa. Devant la cour d’assises, ils n’auront sûrement pour unique objectif que crier leur innocence ou à l’inverse hurler un discours qu’eux seuls considèrent comme politique. Il n’y a rien de politiquement construit dans leurs doctrines d’un autre temps.
Il y aura, surtout, bien au-delà d’un besoin de justice, beaucoup de douleur. Enormément de douleur. En premier lieu pour les familles des victimes. Celles des membres de Charlie. De la jeune policière abattue en pleine rue. De ceux qui se trouvaient à l’Hyper Cacher au mauvais moment. Ensuite, pour un pays tout entier qui s’est réveillé un matin devant des images insoutenables. L’esprit du “Je suis Charlie” est certes loin. L’horreur ressentie, elle, reste intacte.