Répondre aux colères – L’édito de Christophe Bonnefoy
Pas un raz-de-marée, mais pas un échec. Peut-on vraiment tirer des enseignements définitifs des manifestations d’hier ? La vague annoncée n’était finalement pas assez puissante pour emporter le projet de réforme des retraites. A l’inverse, le nombre de manifestants était suffisant pour transmettre un message fort au gouvernement : ne pas accepter de bouger les lignes pourrait mener à un mouvement long – donc coûteux – et aux lourdes conséquences, au moins politiquement.
D’autant que, et c’est nouveau, les syndicats, à défaut d’être sur la même longueur d’ondes, ont tous défilé contre le projet. Certes, pas avec des objectifs communs. Et pas côte à côte. On a vu Philippe Martinez mener les troupes de la CGT à quelques dizaines de mètres de Laurent Berger, de la CFDT. Donc pas vraiment la main dans la main. Le premier demande un retrait pur et simple du projet. Le second un retrait… de cet âge pivot qui fait tant causer.
C’est d’ailleurs, éventuellement, ce sur quoi va pouvoir jouer le gouvernement pour imposer sa réforme. Les divisions. Par exemple, en acceptant de faire un pas en arrière sur les 64 ans que la CFDT considère comme la goutte qui fait déborder le vase ?
Les négociations à venir seront rudes. Mais on peut imaginer qu’Edouard Philippe cherchera à fissurer le front syndical en jouant sur ses divergences. Et au final à faire passer son projet presque intégralement.
Reste une donnée essentielle, qu’il serait dangereux d’oublier : les manifestants d’hier n’étaient pas que des syndiqués. Qui plus est, ils n’avaient pas que les retraites en ligne de mire, mais exprimaient également d’autres colères. Auxquelles il va, aussi, falloir répondre.