Répondre à l’urgence – L’édito de Christophe Bonnefoy
Allez donc expliquer aux parents d’un enfant parti parce qu’il ne voyait pas d’autre issue, que le harcèlement sera la priorité absolue de la rentrée 2023. Allez donc leur dire qu’on s’associe à leur peine, quand leur sentiment est que rien, ou pas grand-chose, n’a été fait pour sauver la vie de leur fille ou de leur fils.
Ça fait des années que ça dure. Ça fait des années qu’on s’offusque de situations connues, signalées, dénoncées mais qui mènent quand même parfois au pire. En l’occurrence, chaque mort est une mort de trop.
Ça fait des années que l’on confie à ceux dont ça n’est pas forcément le rôle, la mission de gérer. Mais un prof est là pour transmettre le savoir. Pas pour jouer les psys, même si la plupart d’entre eux ont en permanence l’œil ouvert sur les éventuels changements de comportement des élèves. Ça fait des années que, hors les murs des écoles, des collèges, des lycées, l’acharnement se fait aussi sur les réseaux sociaux. Qu’ont mis en place les grands pontes de Facebook ou Twitter pour éradiquer le mal ? On vous laisse deviner, en des temps – là, maintenant – où l’humiliation de l’autre passe encore et toujours par le Net. Où même, les modèles de nos enfants peuvent s’adonner au jeu du harcèlement sans qu’on ne leur cherche un seul pou dans la tête.
Alors certes, il serait totalement irresponsable, parce qu’on n’a pas su réagir avant, de ne rien mettre en place maintenant. Et dieu sait qu’il est parfois compliqué d’identifier un mal-être, chez un ado, qui serait le fruit, justement, d’un harcèlement. Mais pour le coup, c’est bien l’absence de réponse adaptée à des faits avérés qui devient révoltante. Le programme Phare au lycée, c’est bien. Désigner un adulte référent au collège, c’est bien. Former les personnels dont ça n’est pas la fonction initiale, on demande à voir. Développer les moyens des plateformes d’alerte et d’écoute, bon… Encore des numéros verts ?
Et si, tout simplement, un élève harceleur trouvait plus son plaisir à aider les autres – les plus faibles, évidemment – qu’à tenter de les détruire ? C’est tout un système d’éducation qui est à revoir.