Raymond Domenech : « un vrai bonheur collectif »
Comme il fallait s’y attendre, c’est un Raymond Domenech souriant
qui s’est présenté, hier, à la traditionnelle conférence de presse d’après-match. Comment pourrait-il en être autrement alors que tout ce qu’il avait prévu face aux Espagnols, s’est déroulé à la lettre et que la qualification pour le quart de finale de la Coupe du Monde est au bout ?
Quel est votre sentiment au lendemain d’une belle victoire face aux Espagnols ?
Raymond Domenech : «C’est un grand moment, un vrai bonheur collectif qui a déteint sur toute la France. Mais ce qui compte, c’est le prochain match. Il faut penser à la récupération, à superviser l’adversaire et étudier leur jeu.»
Il y a eu beaucoup d’émotion au terme de cette rencontre ?
R. D. : «L’émotion dépasse le cadre de l’explication. Après le troisième but, il y a quelque chose de fort qui est sortie du fond de chacun de nous. Il y avait beaucoup de pression, de tension, il fallait un prétexte pour exprimer notre bonheur. Cela ne s’explique pas, cela se vie, tout simplement.»
Les Bleus ont-ils fait le match parfait ?
R.D. : «Non. Il y a eu de mauvaises interprétations. Le match parfait doit avoir lieu le 9 juillet.»
Les motifs de satisfaction ne manquent pas…
R. D. : «Nous avons fait un match construit. Il y avait une idée directrice et ils n’ont jamais lâché. Ils sont restés dans cette optique là car ils savaient que c’était la bonne. Il fallait un bloc solide, on l’a eu.»
Parlez-nous un peu de cette idée directrice.
R. D. : «Ils adorent garder le ballon, trouver des intervalles, il fallait donc les faire jouer plutôt long, étouffer leur milieu de terrain et effectuer un pressing haut. “Zizou” et Thierry (Henry) ont joué contre nature mais ils ont fait un gros travail.»
Franck Ribéry et Patrick Vieira ont également fait un gros match ?
R. D. : «Nous sommes tous contents pour Franck. Il a marqué mais il en a également raté… Quant à “Pat”, son replacement
dans l’axe a fait qu’il a travaillé
différemment, il a fait des efforts
différents et, actuellement, il est
bien dans sa tête. Au théâtre,
vous ne venez pas aux répétitions
mais pour la générale, pour le
football, c’est la même chose. Si
“Pat” n’a pas fait de grands
matches de préparation, ce n’est
pas grave, ce qui compte, c’est
qu’il soit prêt le jour du match et
c’est le cas.»
Cette victoire, est-ce un moyen de montrer que vous aviez raison quant à vos choix ?
R. D. : «Je ne valide pas mon travail, je fais mon travail. Pour moi, l’objectif est de faire que cette équipe s’exprime le mieux possible. Il n’y a pas d’auto-satisfaction.»
On a senti une équipe de France très motivée ?
R. D. : «Ils ont entendu certaines choses sur eux depuis un moment et ils ont eu envie de réagir. Si l’attitude des supporters espagnols, qui ont sifflé la Marseillaise, a pu les motiver c’est bien. Moi, j’ai applaudi l’hymne espagnol. On se sert de tout ce qui peut permettre de maintenir l’équipe au haut niveau.»
Cette victoire va-t-elle permettre de souder un peu plus le groupe ?
R. D. : «La bonne entente dans un groupe ne se programme pas. De trop bons copains qui n’osent plus rien se dire, ce n’est pas bon non plus. J’ai connu les deux cas. Du moment que sur le terrain ils jouent en équipe, cela me va.»
Un mot sur l’arbitrage ?
R. D. : «Il faut dire quand il n’a pas été bon mais également quand il l’a été et c’est le cas. L’arbitre a fait preuve de plus de sensibilité dans le jeu. Psychologiquement, il a su contrôler le match. Quant au penalty, il a eu pour conséquence de garder l’équipe dans la partie et a peut- être mis les Espagnols trop en confiance.»
Contre le Brésil, vous serez une
nouvelle fois dans la peau
d’outsider…
R. D. : «Ni d’outsider, ni de favori.
Nous avons un match à faire,
samedi à 21 heures et nous
devons tout faire pour que dans
cinq-dix ans et plus, les gens se
souviennent de cette rencontre
comme d’un grand moment de
football.»
Aimé Jacquet, qui a mené les Bleus à la victoire en 1998, était à Hanovre. C’est quelqu’un que vous appréciez ?
R. D. : «Il a la même conception du travail que moi, la même sensibilité par rapport au football et je suis heureux de sa présence. Pour moi, c’est un plus.»
Reportage en Allemagne : Yves Tainturier