Saint-Dizier. Quand les cheminots prennent leur direction au mot
En guise de réponse à une demande de prime pour faire face à la flambée des prix de l’essence, les dirigeants SNCF invitaient les cheminots bragards à vivre plus près de leur lieu de travail. Ces derniers ont décidé de les prendre au mot, en campant sur le site jeudi soir.
C’est ce que l’on appelle une action insolite. Mieux, une action de génie. « Une manière de montrer que l’on peut exister localement », se félicitait Benjamin Cabartier. Secrétaire CGT des cheminots et représentant du personnel, ce dernier est l’un des instigateurs de cette manifestation pas comme les autres. « On a vraiment décidé de prendre au mot ce qu’on nous a dit », poursuit celui qui est arrivé en septembre 2004.
Retour en arrière.
Prix de l’essence
Il y a tout juste trois semaines, les prix du carburant s’envolent littéralement, jusqu’à franchir le montant symbolique des 2 € par litre, essence comme diesel. Historique dans l’Hexagone. Si dans les grandes villes les alternatives à la voiture peuvent se trouver facilement, ce n’est pas toujours le cas dans les villages et villes moyennes, comme à Saint-Dizier. Seule option donc, prendre son véhicule pour se rendre au travail. Et quand les salaires sont relativement maigres, comme celui de Fleur, qui touche 1 200 € par mois, chaque déplacement engendre un coût qui se ressent en fin de mois. « J’habite à 15 mn du site. Ça va encore, mais en répétant ce trajet plusieurs fois, ça compte quand même », explique-t-elle.
Une problématique qui revenait régulièrement lors des discussions entre salariés, parmi les plus de 210 que compte l’Etablissement industriel équipement (EIV) de Saint-Dizier. Alors, il y a tout juste trois semaines, Benjamin Cabartier fait une demande à sa direction : une gratification de 50 €, ou une majoration de la prime de travail. « Nous avons laissé une semaine le temps que la demande remonte. Nous n’avions pas de retour, alors nous avons juste prévenu de la tenue possible d’une action », se rappelle le secrétaire CGT. Une action atypique, différente d’une grève.
Soirée camping
Finalement, les réponses arrivent. Pour diminuer les consommations d’essence, « les dirigeants nous ont fait comprendre qu’il fallait vivre plus près de notre lieu de travail ». Alors, les cheminots ont décidé de suivre ces conseils. C’est comme ça que jeudi 24 mars, plus d’une vingtaine ont passé la nuit sur le site, devant l’entrée du bâtiment principal. « On comprend que ce n’est pas facile de s’organiser avec les familles, et la nuit il fait encore un peu frais. » Ce qui n’empêche pas de partager une merguez à la fin de son service.
Certains camarades, amis ou retraités du site, sont venus saluer l’action. Mais pour eux comme pour toute personne extérieure (dont nous), impossible de pénétrer, la sécurité contrôle les allées et venues.
Après cette nuit bien fraîche passée sous tente, « le campement sera levé, chacun va prendre son service comme un jour classique », ajoute le représentant du personnel. Par cette action, les cheminots bragards voulaient montrer que « ce n’était pas un coup de bluff », faire entendre leurs revendications face à l’inflation et le gel des salaires depuis 8 ans. « On va laisser passer 1 à 2 semaines pour voir les réactions. Si besoin, nous sommes prêts à le refaire », conclut Benjamin Cabartier.
Louis Vanthournout
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