Une belle balade à Châteauvillain
Accéder à l’art sans passer par la case billetterie, sans faire la queue à l’entrée et en s’affranchissant des jours et des horaires d’ouverture. C’est en quelque sorte ce que propose le “parcours d’art à ciel ouvert” installé à Châteauvillain, dans le Parc national de forêts. Mais ce n’est pas tout.
Cela fait trois ans que ce qui a été baptisé “La belle balade” fait son petit bonhomme de chemin. Trois ans que les promeneurs se régalent des œuvres qui sont données à voir au sein de cette forêt. Des œuvres plutôt monumentales voire parfois des micro-architectures disséminées ici et là, avec raison, au sein de ce cadre verdoyant qui appelle à une certaine réflexion. « Chaque œuvre est imaginée pour un lieu précis, afin qu’elle soit en parfaite résonance avec son environnement. Les œuvres s’inscrivent dans le paysage, dialoguent avec lui et offrent au public l’opportunité d’arpenter poétiquement la forêt en la racontant autrement », ne manque-t-on pas de faire remarquer au sein de chez Simone qui participe à cette aventure*.
C’est ainsi que sur les presque 4 km de parcours, le promeneur peut partir à la rencontre de treize installations réalisées par des artistes d’influence diverses mais qui se sont tous pliés, d’une certaine manière, à un cahier des charges bien précis. Notamment par rapport au matériau utilisé. Dans ce cas de figure, le plastique, par exemple, ne serait pas fantastique, voyez-vous. L’histoire racontée par l’œuvre doit elle aussi s’insérer pour le mieux. Car l’objectif de ce parcours est d’inviter à « la réflexion sur l’empreinte écologique de nos comportements et nos modèles de développement ».
Trois nouvelles venues
Cette année, ce sont trois œuvres qui sont venues enrichir cette belle balade. La première des trois à se dévoiler au public est “l’œuf” de Jérôme Leyre. Un œuf entièrement réalisé en bois ajouré et qui a pris sa place dans un “emplacement qui protège”, au détour d’un petit chemin. Pour l’auteur, l’œuf s’est imposé à lui rapidement car « c’est une histoire universelle. Et puis cette forme existe déjà à l’état naturel. C’est une forme qui ne m’appartient pas. Une forme idéale », a. expliqué l’artiste qui voit aussi la représentation des quatre éléments dans l’œuf : l’air via la chambre à air de l’œuf, l’eau via l’albumen, le feu via le jaune et la terre via le calcaire de la coquille.
La seconde nouveauté est celle signée par Pedro Marzorati, l’artiste pilier et coordinateur de cette aventure. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il a vu les choses en grand. Avec son installation de neuf mètres de haut, il nous explique qu’il a vu passer une antilope. Une vision prémonitoire de ce que l’évolution du climat va engendrer ? Du moins c’est ce que cette femme, représentant l’Humanité, du haut de son échelle, commence sans doute à apercevoir. Sculptée avec le bois brûlé de la ferme marmessienne de Dominique Guenat cette œuvre raconte aussi une autre histoire.
La troisième installation se nomme “Qui vive”. « C’est la rencontre entre deux personnages : l’homme et l’animal », a indiqué sa créatrice Pauline de Chalendar. L’un est en état d’alerte et de vigilance, sur le qui-vive. « Une attitude de vigilance que l’humain gagnerait à avoir un peu plus », selon la sculptrice. L’autre personnage a la tête repliée sur elle-même avec un trou béant. Est-ce une blessure ? Le cœur de la forêt ?
De notre correspondante Catherine Jeanson
* Ce parcours est le résultat d’une implication collective faisant intervenir le Parc national de forêts, l’association Art in nature, et le camp d’entraînement artistique Simone ainsi que la direction régionale des Affaires culturelles.
Des kilomètres à pied qui n’usent pas les souliers
Les 3,7 km de ce parcours artistique n’usent pas les souliers mais réjouissent plutôt les sens. Traversant le cœur du Parc national et longeant sa réserve intégrale, ce parcours artistique ne doit pas faire oublier qu’une réglementation spécifique protège cet espace et qu’une certaine quiétude des lieux doit être préservée. Il ne doit pas faire oublier non plus qu’il n’y a pas que les œuvres créées par l’homme à regarder. Tous les sens sont invités à être en éveil en parcourant cet espace qui laisse bien sûr aussi à voir des souilles à sanglier, des zones à charbon de bois et des lavières mais aussi le principal personnage de ce parcours : la forêt.
Le départ du parcours se situe au niveau du Val-Mormant à Châteauvillain. Il est signalé par un grand panneau bleu. Accès gratuit libre et permanent (sauf restrictions liées aux périodes de chasse).