Prévisible – L’édito de Patrice Chabanet
Tout avait été dit sur l’intervention télévisée du chef de l’Etat. Certains observateurs avaient même évoqué un tournant dans le quinquennat ! On attendait des mesures chocs, mais la plus significative était la mise en place d’un couvre-feu. Or l’impact médiatique a été sérieusement amorti par la révélation de l’information depuis quelques jours.
Emmanuel Macron s’est surtout livré à une opération sensibilisation. La pandémie ne cesse de progresser. Il revient à chaque citoyen d’en prendre conscience et d’agir en conséquence. D’où les conseils présidentiels, pour ne pas dire les exhortations, en matière de gestes barrières tant dans l’espace public que dans l’univers familial. Des conseils de bon sens, finalement. Emmanuel Macron ne pouvait guère aller plus loin, sauf à vouloir donner à l’Etat un droit de regard sur la sphère privée des Français.
Le couvre-feu alimente déjà la polémique. Il y a d’abord tous les secteurs économiques (restauration, bars, culture, événementiel) qui seront touchés. L’annonce de compensations financières ne calmera pas la colère des professionnels. Il y a aussi la dimension politique. Qu’on le veuille ou non, le couvre-feu est une privation de liberté. Nécessité fait loi, dira-t-on. Et la lutte contre une pandémie inédite peut justifier des contraintes dans la vie quotidienne de nos concitoyens. Mais les Français restent chatouilleux dès lors que leur liberté de mouvement est écornée.
En fin de compte le discours du président de la République ne doit pas être pris à la lettre. Sa pertinence apparaîtra ou non à l’épreuve des faits et des chiffres. Si d’ici à quelques semaines les cas de contamination et d’entrées en réanimation refluent on pourra dire que le pari présidentiel a réussi. Faute de quoi le capital confiance d’Emmanuel Macron s’amenuisera un peu plus. Or, de son propre aveu, pas d’issue à la crise sanitaire avant l’été 2021.