Présent malgré tout – L’édito de Patrice Chabanet
La diplomatie autorise toutes les contorsions. Elle permet de rétablir des connexions avec ceux qu’on ne veut pas voir sur la photo. C’est ainsi qu’il faut interpréter la venue de Vladimir Poutine au Fort de Brégançon. L’initiative de cette rencontre est venue d’Emmanuel Macron. A quelques jours du sommet du G7, à Biarritz, elle vise à associer d’une certaine manière, à distance, la Russie au concert des grandes nations dont elle a été exclue après l’annexion de la Crimée. Les dossiers, pour ne pas dire les contentieux, ne manquent pas. Outre la Crimée, il y a la pression russe sur le flanc oriental de l’Ukraine, le soutien de Moscou au gouvernement syrien, les arrestations d’opposants politiques en Russie. A priori, on ne voit pas Poutine céder du terrain. Il doit une grande partie de sa popularité au fait qu’il a su rétablir une position ferme face à l’Occident, après l’effondrement de l’URSS et les errements d’Eltsine. Emmanuel Macron est convaincu pour sa part que l’absence de dialogue avec la Russie, grande puissance européenne, ne mènera à rien. Face à une Amérique de plus en plus imprévisible et une Chine en quête de leadership mondial, la carte russe devient plus intéressante.
A Biarritz, le chef de l’Etat français pourra se prévaloir d’avoir pris connaissance des intentions les plus récentes du Kremlin en matière diplomatique. S’il n’obtient rien, il risque d’être accusé d’avoir joué le rôle de « petit télégraphiste » de Poutine. C’est le risque principal de ce mini-sommet à Brégançon. Mais il aura essayé. Le G7, lui, sera beaucoup plus difficile à gérer. Le cas Trump peut le transformer en foire d’empoigne. Le président américain s’exprime de plus en plus sans filtre. Sa dernière proposition, celle d’acheter le Groenland, peut faire rire. Mais elle en dit long sur la vision trumpienne des relations internationales. Si, finalement, les sept nations se mettent d’accord sur un texte, qui ne soit pas un catalogue de vœux pieux, on pourra parler de tour de force de la puissance invitante, la France.