Pour l’exemple – L’édito de Patrice Chabanet
Un ancien Premier ministre condamné à deux ans de prison ferme, c’est une première dont François Fillon se serait bien passé. Compte tenu des faits qui lui sont reprochés, l’emploi fictif de son épouse, on ne peut pas parler d’un jugement sévère, mais exemplaire. C’est l’angle d’attaque qu’ont choisi ses défenseurs pour interjeter appel. Ils reprochent à la justice d’avoir travaillé sous pression, référence aux déclarations de l’ex-cheffe du Parquet national financier. Ils estiment aussi que les magistrats n’ont pas respecté la séparation des pouvoirs entre justice et législatif, en s’intéressant au contenu du travail d’attaché parlementaire. Un système de défense hardi : comment établir un délit sans en définir les contours ou comment prononcer un jugement sans attendus ? De toute façon, ces questions de forme ne remettent pas en cause le fond du dossier, l’emploi fictif de Pénélope Fillon.
La justice ne fonctionne pas seulement avec le code pénal. Elle est sensible au contexte qui entoure une affaire, à commencer par les déclarations publiques des prévenus. François Fillon s’est lui-même tiré une balle dans le pied lorsque, visant Nicolas Sarkozy, il s’était écrié : « Imagine-t-on le général de Gaulle mis en examen se présenter à une élection ? ». Une leçon que l’ancien Premier ministre ne s’est pas appliquée à lui-même. Un choix qui lui reste collé à la peau.
Condamné pénalement, François Fillon doit aussi compter maintenant avec la cruauté du monde politique. Seuls quelques élus lui ont apporté leur soutien. Certains dans son propre camp ont dû secrètement applaudir le jugement prononcé hier. Dans sa solitude, il pourra toujours se répéter : «Peut-on imaginer un ancien Premier ministre mis en examen briguer un mandat présidentiel ? »