Portrait Pierre Hennequin
Vingt-deux ans, l’âge de Pierre
A seulement 22 ans, le Chaumontais Pierre Hennequin figure parmi les photographes de scène les plus brillants à l’échelle nationale. En quête de frissons, le jeune homme fait preuve d’une étonnante maturité.
La juvénile innocence transpirant d’un visage aux traits épurés tranche avec une assurance propre à un professionnel aguerri. La beauté se nourrit d’une apparente timidité. Pierre Hennequin n’a pas encore fêté ses 23 ans. De retour des Antilles, le Chaumontais sirote un Martini blanc. Saint-Barth, Londres, New York, Chaumont… Le jeune homme voyage. Pierre Hennequin concède jouir des plaisirs de la vie. Champagne pour tout le monde. Caviar pour les autres. Sans excès. «Les gens s’imaginent beaucoup de choses», glisse le jeune homme avant de concéder avoir «une vie confortable». «Mes parents et mes amis m’ont aidé à ne pas prendre la grosse tête, j’ai perdu beaucoup d’amis, mais j’ai eu la chance de rencontrer les bonnes personnes, mon entourage m’a permis d’éviter certaines dérives», poursuit Pierre Hennequin, lucide quant aux perfections et ombres de l’espèce humaine.
Précieux, précis et passionné, le Chaumontais se penche sur son passé. La découverte de l’outil photographique intervint par hasard. «Mon père faisait quelques photos, on m’a offert un appareil à Noël, j’ai photographié des paysages, mais je n’ai aucun talent pour ça», s’amuse Pierre Hennequin. La révélation survint, en 2009, au pied de la scène de la salle des fêtes de Chaumont. «J’étais au lycée, en classe de seconde, Arthur H donnait un concert, j’ai voulu prendre des photos, mais je ne savais pas comment procéder. J’ai contacté les organisateurs et Mike Vignacq m’a aidé. J’ai pu prendre des photos du concert, j’ai ressenti mes premiers frissons, de véritables frissons», se remémore le photographe.
Pierre Hennequin commence à courir les scènes du grand Est. Son parcours le mènera à Saint-Cloud, théâtre du festival Rock en Seine. «Par miracle, j’ai décroché le droit de prendre des photos, j’ai été contacté par un site spécialisé et elles ont été publiées», se souvient Pierre Hannequin. A seulement 17 ans, le lycéen enchaîne les expériences. Jazz in Marciac, Reggae Sun Ska, Eurockéennes de Belfort… Les dates se multiplient. «Un agent mettait mes photos en vente, mon travail remportait un certain succès, je me suis senti pousser des ailes». En 2011, «au culot», le jeune homme adresse un mail à Gérard Drouot Productions, société productrice des concerts de Lenny Kravitz, Jimmy Page ou Elton John. Culot et talent paient. Pierre Hennequin figurera parmi les cinq photographes autorisés à capter des images du concert de U2 au Stade de France. Le Chaumontais rencontre le Rémois Gérard Drouot pour la première fois à cette occasion. «Je suis tombé nez à nez avec lui à la porte de sa loge, puis il m’a emmené sur scène, ce moment était surréaliste. Nous nous sommes revus plusieurs mois plus tard et j’ai intégré le service Marketing de la société, j’ai appris un nombre de choses considérable pendant un an tout en continuant à prendre des photos», détaille le Haut-Marnais.
Pierre Hennequin œuvre aujourd’hui sous le statut de free-lance. Le photographe indépendant côtoie Boby Allin et le gratin de la profession. Tout en imposant sa touche. «C’est sans doute un défaut, mais une photo doit avant tout me plaire. Je retravaille toujours mes photos, Doisneau créait des scènes, Hamilton utilisait différentes techniques afin de parfaire son travail, je retravaille donc mes photos, mais au final tout est naturel et la différence demeure, on distingue toujours le style d’un photographe, avec ou sans post-traitement», détaille le professionnel. Lou Reed, Lenny Kravitz, Sonny Rollins, Ibrahim Maalouf, Elton John… Pierre Hennequin a gardé un peu de chacun en lui. Des photos, des clics et des claques. Ces torgnoles reçues à l’occasion de concerts inoubliables, autant de moments privilégiés pour un amoureux de musique. «On peut se payer une bouteille de Pétrus, mais certaines choses ne sont pas monnayables, certains moments n’ont pas de valeur et sont émotionnellement très forts», confie le jeune homme, un enfant de 22 ans «ému aux larmes» face au talent de Jacques Higelin. Le plaisir est toujours à venir. «J’espère pouvoir photographier les Rolling Stones et Madonna», glisse le jouvenceau avant de teinter une apparente perfection d’une élégante modestie. «J’ai eu de la chance, j’en ai conscience, mais j’ai su la provoquer en étant présent aux bons endroits et aux bons moments». Le talent fit le reste.
Thomas Bougueliane