Poignant, rageant – L’édito de Christophe Bonnefoy
Terriblement émouvant. Forcément angoissant. Et foncièrement rageant. Pour, au bout du compte, un cruel sentiment d’échec.
On ne peut s’empêcher de penser que l’hommage à Samuel Paty aurait dû être, un peu comme on ne cesse de raviver la flamme du soldat inconnu, de ces cérémonies qui, quand on a tiré les leçons du passé, entretiennent l’espoir qu’on ne revivra pas l’horreur. Il s’est transformé en une douleur qui, à défaut d’ailleurs de pouvoir un jour être totalement apaisée, nous a frappés à nouveau de la plus violente des manières. En se rappelant, ce lundi 16 octobre, qu’un professeur d’histoire-géographie avait perdu la vie à vouloir simplement transmettre la connaissance, on y a ajouté l’injustice supplémentaire d’une macabre répétition : la mort, dans des circonstances similaires, de Dominique Bernard, professeur de français d’Arras.
La minute de silence, dans tous les établissements scolaires du pays, n’a pu que tirer les larmes. Aux professeurs. Aux élèves. Aux parents. A tous ces Français qui voient en l’Ecole ce sanctuaire qu’on ne peut s’autoriser à devenir perméable aux pires maux de la société. Terriblement émouvant. La même minute, et même si on doit s’interdire de trembler face à la barbarie, aura également suscité la crainte de n’être jamais à l’abri de rien. Et en tout état de cause pas de la sauvagerie. Forcément angoissant. Enfin, la mort de Dominique Bernard ne peut que réveiller la colère. Celle de n’avoir pu, malgré les prises de conscience, malgré les discours, malgré ces drames déjà vécus, empêcher que l’histoire ne se répète. Foncièrement rageant.