Pari risqué – L’édito de Patrice Chabanet
Un référendum le jour même des élections européennes : le projet serait donc dans les cartons d’Emmanuel Macron, nouvelle déclinaison de sa technique du « en même temps ». Le pari est risqué, mais le chef de l’Etat ne peut pas sortir de la crise actuelle sans prendre de risques. Les premières réactions, y compris dans la majorité, lui fournissent déjà une indication sur ce à quoi il doit s’attendre. Le référendum escamoterait l’enjeu européen et, surtout, la poussée du souverainisme et du nationalisme dans notre pays. Ou bien il aboutirait à un mélange des genres. Ou bien les questions posées dans le référendum ne correspondraient pas aux préoccupations premières des Français, à commencer par le pouvoir d’achat.
Cela dit, le risque est partagé. Il sera difficile aux oppositions de récuser une formule qu’ils demandent à cor et à cri depuis des semaines. Mais, c’est vrai, elles n’auront pas la maîtrise des questions. On imagine bien que l’exécutif choisira celles dont il attend un retour positif, la réduction du nombre de parlementaires par exemple. La Constitution elle-même, dans son article 11, stipule que le référendum ne peut porter que sur « l’organisation des pouvoirs publics » et « les réformes relatives à la politique économique, sociale et environnementale de la nation ». En clair, pas question d’entrer dans les détails, en décidant une valorisation du SMIC ou l’augmentation des retraites. D’où un malentendu de taille que l’on sent venir : le référendum dont il s’agit ici a peu à voir avec le fameux RIC réclamé dans les manifs et sur les ronds-points. Il n’est d’ailleurs pas exclu que ce dernier fasse l’objet d’une question, ce qui serait habile…
En tous les cas, la concomitance d’élections européennes et d’un référendum à plusieurs tiroirs nous promet une campagne animée. Il y aura les débats de fond, mais aussi les intentions à peine cachées. Les oppositions sont bien décidées à faire mordre la poussière à Emmanuel Macron. Le chef de l’Etat, lui, escompte bien sortir de la crise par le haut et disperser un peu plus le camp adverse. Une bataille à couteaux tirés, c’est déjà sûr.