Opération vérité – L’édito de Patrice Chabanet
Cette fois-ci, on y est. On connaîtra aujourd’hui dans le détail
le contenu des ordonnances portant réforme du code du
Travail. Jusqu’à présent, il faut bien le dire, on ne disposait
que des grandes lignes de ce qui a toujours été présenté comme la
poutre-maîtresse du nouveau quinquennat. Les consultations – et
non pas les négociations – avec chaque partenaire pris isolément
ont permis de maintenir pratiquement jusqu’au bout le secret, ce
qui en soi constitue presque un exploit, après l’ère Hollande traversée
par les fuites et les confidences off. Pour Emmanuel Macron
et son gouvernement, il était temps que se termine cette période
de supputations. Sa majorité et son électorat auront enfin du grain
à moudre face à une opposition hétéroclite, mais efficace pour
assumer le gouvernement de la parole.
Quelle que soit la version finale des ordonnances, on sait qui est
pour et qui est contre, notamment dans la sphère syndicale. On
sait, sans vraiment savoir. L’attitude de FO sera déterminante. Or,
en annonçant dès hier qu’elle ne se joindrait pas à la journée d’action
de la CGT, le 12 septembre, le syndicat de Jean-Claude Mailly
se distingue de la position qu’il avait prise à l’égard de la loi El
Khomri. Il avait alors fait front commun avec la centrale cégétiste.
Il est clair – et c’est de bonne guerre – que c’est tout bénéfice pour
le gouvernement, sachant que la CFDT, de son côté, semble plutôt
pencher vers l’acceptation des nouvelles dispositions.
En difficulté dans les sondages, Emmanuel Macron a donc tout
intérêt à séparer les opposants irréductibles et ce que l’on pourrait
appeler les réalistes, tant sur le plan syndical que sur l’échiquier
politique. Les Français sont peut-être inquiets, voire hostiles,
quant à ce qui sortira des ordonnances qu’ils ne connaissent pas
encore au demeurant. Pour autant, ils ne sont sans doute pas majoritairement
partants pour un troisième tour social qui passerait
par la rue et par la paralysie du pays. Macron joue gros dans cette
affaire. Ses adversaires avides d’en découdre aussi.