« On s’est embrouillés » : à 24 ans, des violences sur sa compagne lui valent 10 mois ferme
Un jeune homme de 24 ans a été reconnu coupable de violences sur sa compagne à Saint-Dizier. Avec circonstances aggravantes. En récidive. Le tribunal judiciaire de Chaumont l’a condamné notamment, ce mercredi 16 août, à 10 mois de prison ferme.
Dans la salle d’audience, mercredi 16 août, sa compagne de 19 ans a finalement réussi à entrer. Assise aux côtés de sa curatrice, elle ne tardera pas à sangloter. C’est le père de l’enfant qu’elle porte, son compagnon Dylan C. , qui est dans le box des accusés, livide.
Dans la nuit du mercredi 9 au jeudi 10 août, à Saint-Dizier, elle a appelé le commissariat de police. Les fonctionnaires indiquent l’avoir trouvée sur le parking du domicile de la sœur de Dylan chez laquelle le couple vivait provisoirement. « Ils parlent d’une jeune femme en pleurs et en état de choc », indique le président du tribunal Jean-François Devalloir.
La demoiselle évoque « des coups de poing, des coups de pied dans le bas du dos et dans les jambes ». Elle est parvenue à s’enfuir. Et précise que son ventre a été épargné. Élément qui lui semble important : elle est enceinte de 4 mois, de Dylan. Qu’elle désigne comme l’auteur de ces violences. Dylan est claquemuré dans l’appartement et refuse d’ouvrir à la police. Il faudra que sa mère vienne sur place pour le convaincre d’en sortir, à 0 h 15. Dix minutes plus tard, son taux d’alcoolémie atteint 0,32 mg/l de sang. Au motif qu’il a consommé des stupéfiants dans les jours précédents, Dylan refuse le contrôle sur la présence éventuelle de stupéfiants. Comme il dit non à une visite médicale pour entrer en garde-à-vue.
« Dès qu’il boit… »
« Dès qu’il boit, il tape, il parle mal (…) Ce n’est pas la première fois (…) Il fume du shit », dit la sœur de Dylan aux policiers qui l’entendent. Sœur qui a hébergé le couple « car la demoiselle était enceinte ».
Oui, la mère de celle-ci les avait mis dehors, Dylan avait eu « des altercations » avec cette dernière, qui a fini par dire stop. Après environ 8 mois pendant lesquels les deux jeunes gens vivaient chez elle. Il est sans emploi, sans ressource ; elle est reconnue handicapée par la MDPH.
Le casier judiciaire du prévenu comporte onze mentions entre 2015 et 2021, dont des faits de violences, récents. La dernière mention fait état d’une condamnation à deux mois de prison ferme pour menaces de mort. Dylan a quitté l’école après la classe de quatrième, à 16 ans. « Depuis, j’ai fait des stages à droite, à gauche ». Dans le secteur de l’entretien des espaces verts, de la boulangerie. Ce dernier « ne (lui) plaisait pas trop » alors oui, c’est lui qui est parti. « C’est ma mère qui me fait vivre ».
« Je croyais que c’était une engueulade normale »
« On s’est juste pris la tête, comme un couple », a déclaré le prévenu en garde à vue. « J’ai aussi pris des coups ». C’est que dans la nuit du 9 au 10 août, Dylan cherche son téléphone, en vain. Sa compagne souhaite dormir sur le canapé. Mais la quête impossible du mobile aurait « énervé » Dylan. Qui pour sa part reconnaît que tous deux « se sont embrouillés » et que la demoiselle « est devenue hystérique ». Aussi l’a-t-il « maîtrisée ». Oui, convient-il à l’audience, il « croyait que c’était une engueulade normale ». Certes, oui aussi, il avait bu. Si Dylan n’a pas ouvert aux policiers le 9 août, c’est qu’ « il y avait un chien staff à l’intérieur ». Bien sûr qu’il « aurait dû réfléchir et partir » avant que la discussion avec sa compagne déraille. Oui encore, il a arrêté son traitement contre son addiction à l’alcool, qui remonte à ses « 15 ou 16 ans », car il le « rendait tout mou ». Sauf qu’à entendre sa mère, « quand il n’a pas bu, c’est un ange » mais « l’alcool le rend bête et impulsif ».
« T’es sérieuse de me faire ça ? »
« T’es sérieuse de me faire ça ? ». Le message vocal que Dylan a laissé à sa compagne, alors hospitalisée dans la nuit du 9 au 10 août dessert son cas. Le conseil de sa compagne réclame 4 000 € de dommages et intérêts. Le représentant du ministère public Laure Pelletier insiste : la compagne du prévenu est « sous curatelle renforcée ». Et fustige « l’absence d’empathie » de l’accusé qui l’ « insupporte ». Avant de requérir 10 mois ferme, notamment. « Absence d’empathie dans cette salle ? Sauf moi… ».
Pour son client Dylan, Me Claudy Grosjean l’a déjà dit, c’était même l’attaque de sa plaidoirie : il s’agit aujourd’hui d’ « une malheureuse affaire ». Quand le prévenu dit « hystérie », il faut entendre « (ma compagne) est entrée dans une colère noire », qu’en étant « perturbée », il a été conduit à « la ceinturer ». Le certificat médical délivré à la victime conclut à 4 jours d’ITT sans s’appuyer sur des termes précis.
Au demeurant, poursuit Me Grosjean, « sur les faits, on a quoi ? ». Si « les stupéfiants, l’alcool… peuvent avoir été un élément déclencheur », c’est un prévenu « malade » que le tribunal a face à lui. Après avoir respecté son obligation de soins, est-ce sa faute s’il est « sur liste d’attente » dans la nouvelle ville qu’il habite (Saint-Dizier, NDLR) ? Et de plaider pour « une mesure d’insertion ».
Après en avoir délibéré, le tribunal judiciaire de Chaumont a condamné Dylan C. à 10 mois ferme avec maintien en détention, retenant trois circonstances aggravantes -la victime est une personne vulnérable, il était son compagnon, il était alcoolisé. Dylan est aussi interdit de contact avec celle-ci pendant 2 ans. Enfin, il doit s’acquitter de 1 500 € de dommages et intérêts et de 500 € au titre de l’article 475-1.
Fabienne Ausserre
f.ausserre@jhm.fr