Nouvelle donne sociale – L’édito de Patrice Chabanet
Les manifs se suivent et se ressemblent dans leur ampleur. L’exécutif et sa majorité ont tout lieu de s’en inquiéter. Ils ne peuvent pas compter sur un recul ou un affaissement des syndicats dopés par ces succès. Les divergences, car il y en a, n’apparaîtront que plus tard.
Rien ne serait plus sommaire ou plus faux que de voir dans ce bras de fer l’affrontement classique entre corps social et partis au pouvoir. D’une certaine manière le dossier des retraites consacre la montée en ligne des syndicats au détriment des partis politiques, souvent écartés des défilés. Pendant des années le discours ambiant consistait à dévaloriser les fameux corps intermédiaires. Or que constatons-nous aujourd’hui ? Les syndicats sont capables de mobiliser des centaines de milliers de personnes, très souvent sans aucun incident. On est loin des manifs des Gilets jaunes et de leurs débordements.
Il faut dire que les partis politiques ont tout fait pour laisser aux syndicats le leadership sur l’opinion publique. Le bazar qu’est devenue l’Assemblée nationale constitue un puissant répulsif. Sans parler des convulsions qui traversent les oppositions. Quoi de commun entre un PS somnolent et LFI dirigée par un chef grand admirateur de Robespierre et caractérisée par des comportements ignobles comme celui de leur député Thomas Portes ? Quelle communauté de projets chez LR entre un Ciotti qui se veut rassembleur et un Pradié, accusé quasiment de gauchisme ? Seul le RN parvient à s’échapper du bruit et de la fureur, mais faut-il y voir autre chose qu’un repli tactique ? Ce n’est pas non plus l’image d’une majorité chancelante au milieu des pièges du dossier retraite qui a des chances de redorer le blason de la politique.
Les syndicats ramassent la mise, mais ils ne sont pas au bout de leur peine. Le taux de syndicalisation est inférieur à 10 % en France. Une faiblesse que ne peuvent pas compenser les succès des manifs.