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Nouveau Relax : « Ça devient dangereux de ne pas exister, d’être oublié »

Les salles de spectacle devraient rouvrir leurs portes le 15 décembre, si la situation sanitaire le permet. Une petite lueur d’espoir pour les artistes et les professionnels du spectacle qui se retrouvent dans une situation « critique ». Angèle Régnier, directrice du Nouveau Relax, s’exprime.

JHM : Le monde de la culture et les artistes sont particulièrement touchés par la crise sanitaire. Quelle est la situation au Nouveau Relax ?

Angèle Régnier : C’est un vrai malheur. Ça devient vraiment critique pour nous, et pour les artistes. Ce qui est fou, c’est que nous avons été très rigoureux. Les règles sanitaires ont été respectées à la lettre. D’ailleurs, il n’y a eu aucun cluster dans une salle de spectacle. C’est vraiment injuste.

On va droit dans une sorte d’embouteillage, entre les spectacles à programmer et ceux à reprogrammer. On peut aider à la création. Et, c’est ce que l’on fait au Nouveau Relax. Mais, on ne sait pas quand ces nouvelles créations pourront être jouées. Pour les artistes, c’est l’impasse.

Pourquoi répéter, pour qui ? Derrière, ils ne sont pas sûrs de pouvoir diffuser leur spectacle. On ne pourra pas continuer longtemps à reporter des dates et laisser de la place aux nouvelles créations. Celles qui se sont faites, ou qui vont se faire. Les artistes se demandent comment ils vont s’en sortir. Même si on essaie de trouver des moyens, on ne pourra pas tout rattraper.

JHM : Les compagnies survivront-elles ?

A. R. : Voici un exemple. Un spectacle très cher à mon coeur, “N’avons-nous pas autant besoin d’abeilles et de tritons crêtés que de liberté et de confiance” par Pauline Ringeade de la Cie l’iMaGiNaRiuM, a été créé la semaine avant le confinement de mars. Il a été joué deux fois depuis. Les répétitions ont repris cet automne pour jouer au Relax, mais la date ( le 12 novembre) a sauté. La programmation de 2020/2021 est déjà établie. Ce qui fait que de nombreuses dates sont reportées pour la saison 2021/2022. Le spectacle a été créé en mars 2020. Il devait avoir une petite vie. Il ne sera finalement joué qu’en 2022 !

Et, faut-il encore que les artistes, qui travaillent dans plusieurs compagnies, soient disponibles pour les répétitions et les représentations ! Si tout est décalé, ça va vite devenir impossible pour les compagnies. Pour les plus grosses, celles qui ont les reins solides, ça ira. Mais les plus petites… Beaucoup vont mettre la clef sous la porte.

Le mieux pour elles est d’être conventionnées. Elles font un travail de territoire et entrent ainsi dans un schéma avec la Région et l’État qui pourront apporter leur aide. Mais, pour conserver ce conventionnent, il y a des cases à cocher. L’une d’elle stipule un certain nombre de représentations à donner sur le territoire. L’interdiction de jouer met donc en péril ce conventionnement.

JHM : Avez-vous pu programmer une nouvelle saison ?

A. R. : Une grosse partie de notre travail de diffuseur est d’aller voir des spectacles pour préparer la saison d’après. Là, on ne peut pas. Les festivals, comme Avignon, ont tous été annulés. On a toujours des propositions dans les tiroirs, notamment avec les spectacles que nous n’avons pas pu programmer lors de la saison actuelle. Et heureusement, avec la carte professionnelle, nous pouvons encore voir des sorties de résidence.

Nous avons aussi fait une proposition à une compagnie pour qu’elle imagine, en parallèle de son spectacle grand public, une version jeune public. Forcément, elle a été très contente de pouvoir avancer sur un nouveau projet grâce à la commande du Relax. Avec cette proposition pré-achetée, elle revit et a pu sortir la tête de l’eau. Elle est en plein travail.

JHM : Avez-vous les moyens de soutenir les artistes et la création ?

A. R. : On essaie d’accueillir des résidences. D’autant qu’ici, on peut le faire. Plusieurs compagnies ont donc pu créer et répéter au Nouveau Relax. C’est notre façon de les aider, de les soutenir. On continue à travailler à nos missions. Nous sommes conventionnés pour cela.

Pour l’équipe aussi c’est important. Tout comme pour les intermittents. Il faut qu’on leur donne les moyens de travailler. Faire leurs 507h, ce n’est vraiment pas gagné. Ils risquent de perdre leur statut si on n’est pas là pour eux. Ce sont des gens qui habitent sur le territoire avec leur famille. Certains sont plus fragiles que d’autres.

Nous avons par exemple une intermittente qui est éducatrice artistique et culturelle. Elle travaille peu sur les plateaux, elle est spécialisée dans les ateliers. Si elle ne peut pu en mettre en place, ni même aller dans les écoles, ça va être problématique.

JHM : Et maintenant ?

A. R. : L’équipe n’a pas perdu son énergie et continue de travailler. On pense à des propositions différentes. On essaie de garder du lien avec les publics via les réseaux sociaux en postant des choses régulièrement. On retrouve actuellement un jeu pour gagner une affiche du Relax, des vidéos des résidences, des interviews, des images des coulisses, des interviews… On réfléchit aussi avec les compagnies, notamment celles accueillies en résidence, pour trouver des solutions alternatives. On invente, en direct avec les artistes, des actions de proximité.

Autour de la résidence de Laurent Vacher qui a eu lieu la semaine dernière, nous avons lancé l’idée d’écrire collectivement un texte, sur la méthode des cadavres exquis (lire ci-dessous). Nous avons aussi interviewé, par visio, quelques personnes âgées de l’Osier Pourpre sur leurs rencontres amoureuses.

Nous continuons également de développer notre travail d’éducation artistique dans les établissements scolaires. L’important est de montrer que l’on est toujours là. Tout reste fragile mais il est important de garder le lien. Ça devient dangereux de ne pas exister, d’être oublié.

Propos recueillis par Julie Arnoux

j.arnoux@jhm.fr

A vos plumes…

Le Nouveau Relax propose de participer à l’écriture d’un texte collectif, sous la méthode d’un cadavre exquis. Laurent Vacher, metteur en scène de la Compagnie Le Bredin et artiste associé au Nouveau Relax, est en résidence au théâtre, pour la création du spectacle Soudain Chutes et Envols. Le texte est une réécriture par l’autrice Marie Dilasser des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes, à partir d’entretiens questionnant les sentiments amoureux de collégiens et de personnes âgées de notre territoire.

Il a démarré le cadavre exquis par quelques lignes, qui relatent une rencontre : une rencontre amoureuse… ou autre chose. C’est à vous, auteur d’un jour ou de toujours, d’en décider !Rendez-vous est donné chaque mercredi pour découvrir l’avancée du cadavre exquis.

Il faut écrire entre cinq à dix lignes à partir des mots ou bribes de phrases et envoyer sa contribution avant 17 h, le lundi suivant à l’adresse : accueil@lenouveaurelax.fr.

« Nous choisirons un ou plusieurs textes dont la dernière phrase sera publiée chaque semaine afin de continuer l’/les histoire(s). La liste de tous les participants sera publiée à l’issue de cette aventure d’écriture collective. »

Laurent Vacher a choisi ces quelques mots pour commencer le texte collectif : “Dans le bus puis dans le train (…) Chaque jour, même heure, matin et soir…” Plusieurs auteurs ont déjà répondu pour proposer une suite.

Hier, son texte a été dévoilé sur le site du Nouveau Relax. “Dans le bus puis dans le train… Soit, 7 h 33 et 8 h 15. Le soir à 17 h 02, train. À 17 h 44, bus. Toujours exact, toujours là. Du lundi au vendredi. Le samedi, le dimanche : rien. Chaque jour de la semaine, tu viens t’asseoir à côté de moi, ou face à moi. Chaque jour, même heure, matin et soir, (texte n° 2 caché) ça fait paraître le temps moins long…” C’est à vous de jouer maintenant. À vos plumes !

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