Notre-Dame : l’auteur des vitraux identifié 160 ans après
Aussi étrange qu’il n’y paraisse, personne ne connaissait le nom de l’artiste à l’origine des vitraux de l’église Notre-Dame. Il aura fallu une rencontre fortuite, quelques jours avant Noël, pour identifier le maître-verrier à l’origine de 19 des 20 vitraux visibles aujourd’hui dans l’église.
C’est une découverte exceptionnelle pour le patrimoine bragard qui est pourtant due… à un pur hasard. « Quelques jours avant Noël, en entrant dans l’église Notre-Dame (à l’occasion de l’opération « Eglise ouverte », Ndlr), j’aperçois une femme assise sur un banc, appareil photo à ses côtés, jumelles en bandoulière et bloc-notes en mains », se souvient Martine Roussel. Intriguée, la déléguée départementale de Sites et Monuments, interpelle cette femme. C’est Katrin Kaufmann, docteur en art du vitrail au sein du Conservatoire de Romont, musée suisse du vitrail et des arts du verre.
« C’est en 1864, alors qu’il est à l’apogée de son art, qu’il crée les vitraux de l’église Notre-Dame de Saint-Dizier. »
S’ensuit une bonne heure de discussion, et une découverte incroyable : le nom du maître-verrier qui a peint 19 des 20 vitraux de l’église Notre-Dame. « Il s’agit de Gaspard Gsell, un Franco-Suisse né en 1814 », raconte Martine Roussel. Ce maître-verrier est l’un des plus célèbres de son époque. Elève du peintre Jean-Auguste Dominique Ingres à l’institut des Beaux-Arts de Paris, il décroche le prestigieux Grand prix de Rome, qui lui vaut un séjour à la Villa Médicis.
Notre-Dame, « à l’apogée de son art »
Reconnu internationalement, Gaspard Gsell crée des vitraux pour la reine d’Espagne, le roi d’Italie, le roi de Suède, pour l’Angleterre, l’Amérique, la Pologne, la Suisse, le Japon, la Belgique, Cuba… En France, il réalise des vitraux pour la chapelle de l’Elysée, pour la basilique de Lourdes, pour de nombreuses cathédrales, dont celle de Dijon. « C’est en 1864, alors qu’il est à l’apogée de son art, qu’il crée les vitraux de l’église Notre-Dame de Saint-Dizier. On lui doit aussi cinq verrières de l’Abbatiale de Montier-en-Der », ajoute Martine Roussel. Ses croquis sont d’ailleurs conservés au musée Carnavalet, à Paris.
L’église Notre-Dame de Saint-Dizier, qui possède la plus grande collection de verrières signées Gaspard Gsell dans le Grand Est, pourrait, grâce à cette découverte, obtenir un classement dans son intégralité au titre des Monuments historiques. C’est en tout cas le sens du dossier déposé par l’association Sites et Monuments auprès de la Drac du Grand Est. L’église Notre-Dame, construite en 1202 par Gui II de Dampierre, ne bénéficie actuellement que d’une inscription aux Monuments historiques.
P.-J. P.