Nogent et la Révolution (1/3) : 1789, quand la disette menaçait
Dans la perspective des Journées du patrimoine des 16 et 17 septembre, axées cette année sur la période révolutionnaire, Thomas Morisot, adjoint au directeur du Musée de la coutellerie, féru d’histoire locale, commence à planter le décor. Attention, des extraits de textes des registres des délibérations de l’époque sont dans l’orthographe d’origine.
Si l’on reprend nos cours d’histoire, on se souvient aisément que l’une des causes de la Révolution Française fut le manque de pain. Nogent – ou Nogent-le-Roy comme il fallait l’appeler jusqu’en 1792 – ne fit pas exception. En effet, sur l’ensemble du département, les récoltes de 1788 se voient amoindries pour cause de pluie et grêle.
C’est dans ce contexte que le 14 juin 1789 la municipalité se retrouve alarmée : « Les membres de la municipalité de Nogent-le-Roy assemblés au lieu ordinaire, le Sieur Prévost sindic (comprendre M. Prévost, syndic municipal, ndlr) a dit que mardy dernier, le marché de ce lieu a manqué d’approvisionnement de grain, au point que le prix en a été considérablement augmenté et que la populace a été alarmée que les fermiers et propriétaires du voisinage ne se rendent plus audit marché ainsy qu’aucuns le faisaient précédemment, ce qui aperera (résultera) nécessairement une disette si il n’y est promptement pourvû ». Pour remédier à ce trouble, la ville va demander à la maréchaussée d’intervenir auprès des fermes qui pourraient posséder encore du grain. En décembre 1790, un comité de subsistance composé de douze membres est formé afin de répondre aux difficultés d’approvisionnement avec une capacité d’emprunter au nom de la communauté. Ce dernier reçoit l’appui de plus d’une centaine de Nogentais (tout du moins sachant signer), et se voit présidé par François Rémond, ancien notaire.
Un problème récurrent
Cette situation va perdurer tout au long de la Révolution. En mai 1790, ce sont les boulangers qui n’ont plus de pain en boutique. En 1793, c’est la grêle qui vient frapper les récoltes le 27 du mois de juin et en octobre la municipalité se doit de former un nouveau comité de subsistance, cette fois-ci autorisé à faire les réquisitions nécessaires. La tâche est tellement rude que trois mois après, onze des douze membres constituant ce nouveau comité jettent l’éponge et demandent à être remplacés ! Parallèlement, la ville va chercher à développer la culture de la pomme de terre à Nogent, qualifiée de “Reine” par l’un de ces officiers, afin de pallier le manque de grains. Pendant l’année 1795, les difficultés d’approvisionnement continuent et la garde nationale est sollicitée afin d’obliger les agriculteurs à fournir des grains auprès des fermes de Nogent et des communes d’Odival, Sarcey, Mandres, Vitry, Poinson, Louvières, Esnouveaux et de Lanques. Tout cela n’est pas sans causer des troubles lors des marchés, au point que l’on rapporte « qu’il seroit dangereux de les tolérer, que la municipalité se trouveroit continuellement exposée à essuyer non seulement des injures mais encore des voyes de fait si leurs auteurs n’étoient puni sévèrement ».
Néanmoins, le manque d’approvisionnement ne fut pas la seule difficulté rencontrée pendant cette période, les guerres vinrent aussi frapper le quotidien des Nogentais.