Une nécropole carolingienne mise au jour à Andelot
Dans le cadre de fouilles réalisées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) pour l’extension d’un lotissement à Andelot, une nécropole du Moyen-Age a été mise au jour. Quarante-cinq tombes carolingiennes vont être étudiées.
Sur les hauteurs d’Andelot, les cinq archéologues de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) sont à l’ouvrage. Pinceaux ou autres outils en main, ils dégagent les ossements de corps inhumés au Moyen-Age entre le VIIIème et le IXème siècle. Les fouilles ont débuté le 6 mars et doivent se terminer mi-avril. Responsable scientifique à l’INRAP, Stéphanie Desbrosse-Degobertière supervise cette mission organisée à l’emplacement de l’extension d’un lotissement par la mairie.
Les experts avaient bon espoir d’y faire des découvertes. Il faut rappeler qu’en 2010, une partie de ce cimetière médiéval avait été révélée fortuitement au moment du chantier de construction d’une maison de retraite. Laquelle bâtisse n’a finalement pas vu le jour mais qui avait au moins permis de faire avancer les connaissances historiques locales.
Période carolingienne
« Nous avons ici 45 tombes environ, liées à une carrière où se faisait l’exploitation de la pierre. Pour le moment, nous n’avons pas d’éléments pour dater la carrière », détaille Stéphanie Desbrosse-Degobertière. « On s’attendait à des tombes de la période mérovingienne, du VIème ou VIIème siècle, mais normalement les tombes de cette période comportent du mobilier d’accompagnement : les hommes ont des armes, les femmes ont des bijoux et l’on trouve des céramiques. Ici, rien du tout ! Donc on est probablement sur une période où l’on ne dépose plus d’objets dans la tombe », poursuit l’experte.
Elles sont probablement de l’époque carolingienne. Une période où tout le monde est converti au christianisme, où il n’y a plus d’objets, « on repart nu, comme on est arrivé » et l’inhumation ne se fait pas encore dans les cimetières autour des églises.
Dans les tombes, ont été découverts des hommes, des femmes et des enfants. « Il s’agit des morts classiques d’un village sur 100 ou 200 ans », analyse Stéphanie Desbrosse-Degobertière au vu des données dont elle dispose.
Pour connaître le quotidien rural à l’époque médiévale
Une fois les fouilles effectuées, les ossements restent en place. « Leur position permet de restituer un certain nombre d’informations. Par exemple, on voit que les corps ont été déposés dans des troncs d’arbres évidés. On voit le squelette qui a glissé, tous les ossements sont alignés. (…) Les ossements sont photographiés, décrits, enregistrés, puis on retire tout et on emmène tout à notre base à Châlons-en-Champagne », observe l’experte. Sur place, l’équipe disposera de deux années pour les étudier et produire un rapport. « Charge à nous de voir s’il y aura un article, un livre ou s’il sera présenté dans les colloques. »
La découverte est-elle exceptionnelle ? « Alors non et c’est justement ce qui nous intéresse : cela concerne les morts quotidiens d’un village. A l’époque médiévale, on écrit sur les rois, sur les évêques et sur les villes, mais pas sur les campagnes. C’est peu documenté. En plus en Haute-Marne, on n’intervient pas souvent et dans ce secteur encore moins. Nous allons pouvoir connaître le quotidien de ces personnes en étudiant les ossements et évaluer leurs conditions de vie », conclut Stéphanie Desbrosse-Degobertière.
Sylvie C. Staniszewski
s.chapron@jhm.fr
C’est quoi l’INRAP ?
L’Institut national de recherches archéologiques préventives est un établissement public placé sous la tutelle du ministère de la Culture et de la recherche. Il assure la détection et l’étude du patrimoine archéologique en amont des travaux d’aménagement du territoire et réalise chaque année quelque 1800 diagnostics archéologiques et plus de 200 fouilles pour le compte des aménageurs privés et publics.
Ses missions s’étendent à l’analyse et à l’interprétation scientifiques des données de fouille ainsi qu’à la diffusion de la connaissance archéologique. Quelque 2 000 agents sont répartis dans huit directions régionales.
Des conditions plutôt rudes pour les archéologues
Les fouilles qui se tiennent actuellement à Andelot ont été lancées le 6 mars et doivent durer cinq semaines. Et ces derniers temps, on peut dire que l’équipe n’a pas été gâtée par la météo. Entre la pluie, la grêle et l’orage, les conditions auront été rudes. Depuis ce 3 avril il ne pleut plus, mais le vent glacial balaie le plateau où ils œuvrent. Et franchement, ce n’est pas rien !
De plus, la position de fouille : à plat ventre sur une planche – même avec un peu de mousse – les bras en tension n’est pas des plus confortables à la longue. « On ne bouge pas beaucoup, le corps et les abdos sont en tension. A la longue c’est fatigant. Encore plus avec le vent très froid », observe une jeune femme mobilisée et qui garde le sourire.
Les données sont entrées en temps réel dans la tablette tactile. Un moyen de gagner du temps en évitant la prise de notes dans un premier temps suivie de la saisie informatique. Mais avec le froid et/ou la pluie, là aussi, ce n’est pas si simple.
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