Mongin, la signature de l’excellence
NOGENT – Biesles
Après avoir évoqué les forges, Philippe Savouret revient sur le parcours d’un artiste, Jacques Mongin, dont le savoir-faire et l’entreprise perdurent malgré sa disparition.. Retour sur son métier passion : la coutellerie d’art.
Jacques Mongin est né à Biesles le 30 août 1932. A l’époque, plus de 80 forgerons travaillaient dans la deuxième commune du bassin nogentais. C’est dire si l’enfant baignait dans la coutellerie. Toujours dans les jambes de son père, il a dû patienter jusqu’à l’incontournable certificat d’études pour réaliser son rêve le plus cher : devenir coutelier professionnel. Jacques sera l’apprenti de son papa pendant six ans et deviendra un compagnon accompli car, plus tard, en 1965, il décroche le titre de Meilleur ouvrier de France en coutellerie. Un véritable honneur pour l’ex-apprenti de Biesles qui se verra remettre sa médaille à l’Elysée par le général De Gaulle suivi d’une réception à la Sorbonne puis à l’Hôtel-de-Ville de Paris…
Des journées bien remplies
Jacques travaille de 6 h 30 le matin à 18 h 30 le soir avec juste une pause à midi. A part quelques dimanches qu’il s’octroie pour la chasse ou la pêche, Jacques profite de la tranquillité dominicale de son atelier pour créer ses couteaux de prestige tel “le Diderot” en 1984 pour le bicentenaire de l’illustre Langrois. Grâce au travail, une moto (Terrot) remplacera son vélo. Au retour de son service militaire, les Mongin père et fils ont travaillé côte à côte avec chacun une production. Le père de Jacques était spécialisé dans les couteaux à ouverture automatique, lui dans les fermants et les couteaux de chasse. Jacques avait épousé Carmen, que certains ont bien connue, vu qu’elle le secondait. L’atelier est situé au cœur de Biesles. Les horaires étaient à la carte. En 1990, le benjamin des ouvriers affichait quatorze ans de maison et l’aîné, 26 ans. Jacques s’occupait de conseiller de jeunes talents et n’hésitait pas à se rendre dans les salons comme Paris ou Chambord. Parmi ses clients : Peter, Hermès, Kendall, Lorenzi, le duc d’Orléans et même certains Japonais. C’était une petite entreprise de huit personnes.
Près de 800 kg d’acier par an !
Côté production, Jacques Mongin crée de nombreux modèles pour arriver aux couteaux qui ont fait sa renommée à travers le monde. Quelque 5 000 à 6 000 couteaux sortent par an de l’atelier de Biesles avec une gamme de 400 modèles. Les couteaux de poche multi-pièces et les couteaux de chasse se taillent la part du lion. Près de 800 kg d’acier sont utilisés par an. Pour les manches, le choix est vaste entre le bois d’amourette, le palissandre, la bruyère, la corne de buffle, l’inox, l’écaille de tortue, la corne de bovidés, les bois de cerf, l’ivoire. Avec les différentes combinaisons de montures, de pièces, de manches, on peut imaginer le nombre de couteaux que ça peut représenter. Pour les prix, il y a en a pour toutes les bourses. La forge et le trempage des pièces sont réalisés sur place. Chez Mongin, les barres d’acier rentrent d’un côté avec les sacs de corne et les couteaux finis sortent d’un autre côté et le tout fait à la main !
Ses deux filles et son fils ne reprendront pas la suite. Son gendre Claude Margaux poursuivra l’activité jusqu’en 2018. Jacques décède en 2021. Charly Gascard reprendra l’entreprise. A suivre, dimanche prochain.